Marche sur Ottawa et l’émeute de Regina | l'Encyclopédie Canadienne

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Marche sur Ottawa et l’émeute de Regina

En avril 1935, environ 1 500 résidents des camps de secours pour les chômeurs du gouvernement fédéral en Colombie-Britannique font la grève. Ils voyagent par train et par camion à Vancouver pour protester contre les mauvaises conditions de vie qui règnent dans ces camps, construits dans le contexte de la crise économique. Après des mois de protestation en vain, ils décident de poursuivre leurs efforts à Ottawa. Le 3 juin, plus de 1 000 grévistes ont commencé à parcourir le pays en montant clandestinement sur des wagons de trains. À Regina, ils étaient plus de 2 000. À destination, toutefois, les meneurs de la grève sont arrêtés, donnant lieu à la violente émeute de Regina le 1er juillet 1935.

Marche sur Ottawa

Sauts à cloche-pied sur les rails à Kamloops.
(avec la permission de la collection du Toronto Star/016120-9000)


Grève des travailleurs

Au début d’avril 1935, en pleine crise économique, les travailleurs des camps de secours pour chômeurs déclenchent une grève et une protestation à l’instigation de la Ligue d’unité ouvrière et de son représentant officiel, Arthur Evans. La Ligue est ouvertement affiliée au mouvement communiste international. La protestation a pour origine un désir d’améliorer les conditions et les avantages dans les camps, où les travailleurs font des semaines de 44 heures à un salaire de 0,20 $ par jour. Le gouvernement fédéral du premier ministre R.B. Bennett, toutefois, est réticent à leur fournir du travail et des programmes salariaux.

À Vancouver, les grévistes s’organisent en divisions. Ils s’allient à différents groupes civils, ethniques, politiques et de main-d’œuvre, organisent des manifestations et s’adressent aux représentants officiels du gouvernement, dont le premier ministre de la Colombie-Britannique, Dufferin T. Pattullo, et le maire de Vancouver Gerald McGeer.

La protestation, qui durera deux mois, mène notamment à l’occupation du magasin de la Compagnie de la Baie d’Hudson et du musée et de la bibliothèque municipaux. Un défilé, au mois de mai, attire également quelque 20 000 grévistes et partisans au parc Stanley.

Négociations avec Ottawa

Les administrations locales refusent toute responsabilité quant au bien-être des grévistes. Les hommes commencent à s’impatienter devant l’échec apparent de leurs efforts. En réponse, Arthur Evans et ses collègues décident de se rendre à Ottawa. Le 3 juin, plus de 1 000 grévistes entreprennent la « Marche sur Ottawa ». Ils souhaitent ainsi sensibiliser la population à leur cause et porter plainte devant le Parlement et le premier ministre de l’époque, R.B.Bennett.

Les grévistes, à bord de trains de marchandises qu’ils ont réquisitionnés pacifiquement, font escale à Calgary, à Medicine Hat, à Swift Current et à Moose Jaw, où de nombreux autres hommes rejoignent les rangs. Leur nombre passe ainsi à environ 2 000 lorsqu’ils arrivent à Regina le 14 juin. Là-bas, les compagnies de chemins de fer, sur ordonnance du premier ministre, leur refusent l’accès aux trains.

Les négociations avec les deux ministres du Cabinet du gouvernement fédéral ont lieu le 17 juin, mais sont infructueuses. On envoie donc huit marcheurs à Ottawa pour une rencontre avec R.B. Bennett. Le reste du groupe attend au terrain d’exposition de Regina. Ils y sont nourris et logés par les gens de l’endroit et le gouvernement de la Saskatchewan, même si le premier ministre James Gardiner voit d’un mauvais œil que le convoi de protestants a été arrêté dans sa capitale provinciale.

Richard Bedford Bennett

En 1933, au plus fort de la crise, il semble indécis et inefficace. Il devient la cible d'interminables railleries.
(avec la permission Bibliothèque et Archives Canada/e000009295)


Émeute de Regina

Les entretiens d’Ottawa se soldent rapidement par un échec. La délégation revient à Regina, ayant décidé de mettre un terme à la marche. On convoque un rassemblement à la place du marché de Regina pour le 1er juillet, afin d’obtenir l’assistance de dernière minute des gens de la région. Bien que le mouvement soit maintenant dispersé, le premier ministre Bennett est déterminé : il faut procéder à l’arrestation de ses dirigeants. Ce jour-là, les policiers et les escouades de la GRC de Regina se jettent sur une foule d’environ 300 personnes pour arrêter Arthur Evans et d’autres orateurs, événements qui donneront lieu à l’émeute de Regina.

Dans les rues de Regina, le conflit fait rage. Les marcheurs attaquent les policiers à coups de pierres et de bâtons. Les policiers répliquent en tirant dans la foule. L’émeute prend fin vers minuit, une fois les manifestants revenus au terrain d’exposition. Deux personnes, dont un policier local, sont tuées pendant l’émeute, tandis que des centaines d’émeutiers, de policiers et de citoyens sont blessés. Quelque 130 émeutiers sont mis en état d’arrestation. Le grabuge cause également des dommages physiques évalués à plusieurs milliers de dollars. Quatre jours plus tard, le gouvernement de la Saskatchewan aide les marcheurs à rentrer chez eux, la plupart effectuant leur voyage de retour à bord de trains de passagers à destination de Vancouver.

Émeute de Regina

Les émeutiers convergent vers des policiers et un homme blessé.

(avec la permission de Wikimedia Commons)


Héritage

La répression des marcheurs et l’animosité dont fait preuve R.B. Bennett envers Arthur Evans contribuent au déclin politique du premier ministre. (Voir aussi New Deal de Bennett.) La manifestation contribue également à rehausser la présence publique du Parti communiste du Canada pendant l’une des périodes les plus sombres de la crise économique des années 1930. En 1997, le théâtre de l’émeute de Regina est déclaré lieu historique national par le gouvernement fédéral.

Voir aussi Vancouver en vedette: le maire McGeer lit le Riot Act.

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