La théorie de la tectonique des plaques de John Tuzo Wilson | l'Encyclopédie Canadienne

Éditorial

La théorie de la tectonique des plaques de John Tuzo Wilson

L'article suivant est un éditorial rédigé par le personnel de l'Encyclopédie canadienne. Ces articles ne sont pas généralement mis à jour.

Le 24 juillet 1965, la revue britannique Nature publie un article qui révolutionne notre compréhension des phénomènes géologiques. Il est écrit par le scientifique canadien John Tuzo Wilson, un homme doué d'une vitalité remarquable et d'une intuition extraordinaire. Pour le Scientific American, l'explication que donne Wilson de la nouvelle théorie de la tectonique des plaques est « une des cinq avancées scientifiques les plus marquantes du siècle ».

Wilson voit le jour à Ottawa. Il est le fils d'un ingénieur écossais et d'une alpiniste audacieuse. Au milieu des années 1920, il délaisse la physique au profit de la géologie, à la consternation de ses professeurs. À cette époque, la physique connaît son âge d'or, révélant les secrets de l'univers, alors que la géologie est considérée comme une activité guère plus respectable que la philatélie.

L'incompréhension totale des processus à l'origine de la Terre n'est pas le moindre des problèmes de la géologie. Comment se forment les continents? Qu'est-ce qui cause les volcans et les tremblements de terre? Si les continents n'ont jamais bougé, comme le veut la croyance générale, pourquoi des masses continentales situées à des milliers de kilomètres l'une de l'autre, l'Amérique du Sud et l'Afrique plus particulièrement, semblent-elles s'emboîter comme les pièces d'un casse-tête?

L'idée que les continents se déplacent est envisagée pour la première fois au début du XXe siècle. Le météorologue allemand Alfred Wegener propose alors que les continents « dérivent », mais personne ne le prend au sérieux parce qu'il n'a pas d'explication. L'hypothèse est l'objet d'un scepticisme acerbe et généralisé.

Ce n'est pas avec des magnétomètres, des microscopes ou des marteaux que les géologues vont pouvoir résoudre cette énigme, mais avec une nouvelle science, une théorie qui explique la constitution de la Terre. « C'est le sympathique et terre-à-terre J. Tuzo Wilson, professeur à l'Université de Toronto, qui, essentiellement, créera cette nouvelle science », racontera Simon Winchester dans son livre Krakatoa.

Wilson fonde sa théorie de la « tectonique des plaques » sur de brillantes déductions. Tout d'abord, il examine le curieux cas des îles Hawaii. En survolant les îles, il découvre ce que les anciens Hawaiiens ont toujours soupçonné. Alors que l'activité volcanique bat encore son plein sur la grande île d'Hawaii, sur l'île de Niihau, la plus éloignée, le volcanisme est presque inactif et, de toute évidence, beaucoup plus vieux. Wilson en déduit qu'il doit y avoir un « point chaud » fixe au-dessus duquel les îles se déplacent. Le manteau et la croûte de l'archipel sont bel et bien en mouvement!

La deuxième découverte de Wilson est un véritable éclair de génie! Elle se produit alors qu'il expérimente avec du papier et des ciseaux pendant un congé sabbatique à Cambridge. « J'ai découvert un nouveau type de failles », déclare-t-il à ses collègues. « Impossible », répondent-ils. Wilson se contente de sourire et de montrer aux sceptiques sa nouvelle sorte de faille en ouvrant et fermant une feuille de papier pliée. « J'assistais à quelque chose de profondément nouveau et fondamental, écrira John Dewey après coup, et j'étais en présence d'un homme très ingénieux et original. »

Ce type de faille explique pourquoi les grandes crêtes du fond des océans Atlantique et Pacifique sont cisaillées par des dizaines de tranchées profondes. Il nomme ce phénomène « faille transformante ». Il le dessine au crayon, le découpe et le garde dans son portefeuille pour le montrer à qui voudrait le voir. Quiconque assiste à une démonstration improvisée est immédiatement convaincu.

« De nombreux géologues ont soutenu que les mouvements de la croûte terrestre sont concentrés dans des zones mobiles, soit des chaînes de montagnes, des dorsales océaniques ou des failles majeures, écrit Wilson. Cet article propose que ces éléments ne sont pas isolés, que peu constituent des culs-de-sac, mais qu'ils sont connectés en un réseau continu de zones mobiles qui ceinturent la Terre et divisent sa surface en plusieurs grandes plaques rigides. »

C'est ainsi que Wilson prouve la théorie de la tectonique des plaques. L'idée de la fixité des continents est maintenant chose du passé. C'est une époque particulièrement enlevante pour les scientifiques. Ils peuvent maintenant considérer la Terre dans sa globalité, les mouvements de la croûte et du manteau supérieur causant l'ouverture et la fermeture d'océans tout entiers.

La carrière exceptionnelle de Wilson ne s'arrête pas lorsqu'il quitte l'université. En tant que directeur du Centre des sciences de l'Ontario, il déroge de la norme en plaçant des affiches « Toucher SVP » sur les expositions. Il aura enseigné sa nouvelle théorie dans plus de cent pays, profitant de ses temps libres pour naviguer sa jonque chinoise sur la baie Georgienne ou pour escalader une montagne par-ci, par-là.