Soldats de fortune | l'Encyclopédie Canadienne

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Soldats de fortune

Comme le mercenaire, le soldat de fortune est prêt à servir dans l'armée ou la police d'un autre État ou sous les ordres de quelqu'un en pays étranger.
Joseph Boyle
Les exploits de Boyle, en Europe de l'Est ont fait de lui l'un des aventuriers les plus discrets du Canada (avec la permission du Woodstock Museum).

Soldats de fortune

Comme le mercenaire, le soldat de fortune est prêt à servir dans l'armée ou la police d'un autre État ou sous les ordres de quelqu'un en pays étranger. Contrairement au mercenaire, motivé surtout par l'appât d'un gain, financier ou autre, le soldat de fortune cherche l'aventure ou obéit à des motifs idéalistes. On en trouve des exemples très anciens : ainsi, Colomb est un Génois de service dans la marine espagnole. Au XIXe siècle, lord Byron se joint aux philhellènes pour aider la Grèce à se libérer du joug turc, et l'« armée toujours victorieuse » de Gordon pacha attire des soldats de fortune pendant la révolution des T'ai-p'ing en Chine au cours des années 1860. La Légion étrangère française en attire aussi dès sa fondation en 1831. Au XXe siècle, la Légion étrangère espagnole, les « Flying Tigers » en Chine et les brigades internationales de la guerre civile espagnole attirent tous des soldats de fortune dans leurs rangs.

Les soldats de fortune canadiens sont souvent des soldats de carrière ou des hommes d'affaires devenus aventuriers par hasard : ainsi, sir William Fenwick WILLIAMS, de la Nouvelle-Écosse, devient commandant d'une armée turque pendant la guerre de Crimée (1854-1856), et Alexander Roberts DUNN, de Toronto, mérite la Croix de Victoria pendant le même conflit à l'occasion de la charge de la brigade légère, à Balaklava. Ailleurs, Daniel O'Connor, d'Ottawa (mort en 1858), est volontaire dans la Légion irlandaise contre les troupes coloniales espagnoles de Panama au début des années 1820. John RICHARDSON combat de 1834 à 1837 dans la Légion auxiliaire britannique pendant les guerres carlistes d'Espagne. Le colonel George Mason Green (1836-1912) et Narcisse Faucher de Saint-Maurice sont respectivement au service de Juarez et de l'empereur Maximilien pendant l'occupation du Mexique par la France dans les années 1860.

On estime qu'environ 45 000 Canadiens servent aux États-Unis pendant la GUERRE DE SÉCESSION. Plusieurs centaines de Canadiens français se joignent au corps canadien des ZOUAVES pontificaux de l'armée papale pour empêcher les troupes du roi Victor-Emmanuel de réaliser l'unification de l'Italie (1868-1870), alors qu'Arthur BUIES sert dans l'armée adverse, commandée par Giuseppe Garibaldi. Le Torontois Brig William Ryan, vétéran de la Guerre de sécession, se joint à l'armée révolutionnaire cubaine, est capturé à bord du navire de flibustiers Virginius en 1873 et est exécuté par les Espagnols à Cuba. Un autre vétéran de la Guerre de sécession, le lieutenant William Winer Cooke (né en 1845), de Mount Pleasant (Ontario), participe aux combats contre les Amérindiens à titre d'adjudant du colonel George Armstrong Custer et est au nombre des 14 Canadiens de la 7e Cavalerie américaine. Au moins 4 d'entre eux meurent avec Custer à la bataille de Little Big Horn en 1876. Pendant la RÉBELLION DU NORD-OUEST (1885), Martin Waters Kirwan (1841-1899), ancien combattant de la Légion étrangère française, est officier d'état-major de l'armée commandée par le major-général Frederick MIDDLETON, alors que William Henry JACKSON se joint aux troupes métisses en tant que secrétaire de Louis RIEL. William Grant STAIRS s'empare du Katanga (Shaba) pour le compte de la Belgique au début des années 1890. Le commandant Joseph Chapleau meurt au combat en 1897 pendant une attaque contre une garnison espagnole, et neuf Canadiens font partie des « Rough Riders » envoyés à Cuba par Theodore Roosevelt pendant la GUERRE HISPANO-AMÉRICAINE de 1898, dont les péripéties sont décrites par l'une des premières et des plus célèbres correspondantes de guerre canadiennes, Kathleen (Kit) COLEMAN. George Charette, de Sainte-Élisabeth (Québec), est volontaire dans la marine des États-Unis pendant le même conflit et l'aide à couler une barge à l'entrée du port de Santiago. Henry Herbert STEVENS est membre de l'armée des États-Unis aux Philippines, puis en Chine pendant la révolte des Boxers. Le colonel Charles James Townsend Stewart (1874-1918), de Halifax, tué sur le front occidental pendant la Première Guerre mondiale pendant qu'il commande la Princess Patricia's Canadian Light Infantry, a été soldat de fortune en Chine et au Pérou. Il a aussi été cavalier de la Police à cheval du Nord-Ouest au Yukon et contremaître des chemins de fer en Colombie-Britannique.

James Kennedy CORNWALL sert au Venezuela pendant une révolution vers 1900, et Frederic Franklin WORTHINGTON commande trois navires de la marine nicaraguayenne contre l'unique navire salvadorien de Frederick William Thompson (1888-1985) pendant une guerre frontalière en 1906. Les deux hommes serviront plus tard dans la batterie de mitrailleurs de Borden sur le front occidental. Aloha Wanderwell Baker sert dans Légion étrangère française contre les Rifains en tant que soldat, pilote et photojournaliste. Pendant les années 20, il est conseiller d'une armée chinoise engagée dans les luttes des seigneurs de la guerre, en même temps que Morris Abraham COHEN commande une autre armée chinoise.

 Leon Bedat (1881-1961), de Huntsville (Ontario) et Jan Van den Berg (1884-1961), avec plusieurs dizaines d'autres Canadiens, sont volontaires pendant les révolutions mexicaines de 1911 à 1920. Plus tard, les deux hommes combattent sur le front occidental pendant la Première Guerre mondiale, puis dans le Sud de la Russie au cours de l'INTERVENTION DU CANADA DANS LA GUERRE CIVILE RUSSE, à laquelle participent également Raymond COLLISHAW, Joseph Whiteside BOYLE (dit « Klondike Joe »), John Edwards LECKIE et Walter Sussan (1892-1969).

T.V. McCallum, de Toronto, devient membre de l'escadron aérien Kosciuszko et est tué en Pologne en combattant les bolcheviks en 1920. Hilliard Lyle (1878-1931), d'Allenford (Ontario), sert dans l'armée grecque contre la Turquie (1920-1922), tandis que Sussan est pilote de combat dans la force aérienne grecque. En 1925, Sussan se joint à l'Escadrille de la Garde chérifienne au Maroc et pilote des bombardiers pour les Français contre les rebelles rifains dirigés par Abd el-Krim. Bert Levy (1897-1965), de Hamilton (Ontario), et Alfred Batson (1900-1977), de Vancouver, sont officiers d'artillerie dans l'armée d'Augusto Sandino au Nicaragua au milieu des années 20, tandis que Ralph Beardsley (1899-1982) et Ted Huestis (1909-1961) combattent pour le gouvernement aux côtés de l'infanterie de marine des États-Unis et de la Guardia Nacional. Huestis est conseiller de l'armée chinoise et pilote de la force aérienne équatorienne, et Levy est le premier Canadien à se joindre au bataillon britannique de la brigade internationale pendant la guerre civile espagnole (1936-1939).

Le journaliste syndical et dramaturge torontois Edward Cecil-Smith, ancien aventurier en Amérique du Sud, commande le BATAILLON MACKENZIE-PAPINEAU en Espagne. Pendant le même conflit, Henry Norman BETHUNE dirige le célèbre service canadien de transfusion sanguine pour l'armée espagnole, dont font également partie Hazen Sise et Ted Allan, de Montréal, Henning SORENSEN, de Vancouver, et Allen R. May, de Toronto. Ralph Linton, de London (Ontario), après avoir combattu les Japonais dans une armée de guérilla chinoise, sert également en Espagne, de même que les écrivains Alain GRANDBOIS et Hugh GARNER. L'aventurier et journaliste sir Michael Bruce (1894-1957), de la Colombie-Britannique, dirige deux rébellions au Brésil et écrit plusieurs livres autobiographiques.

 L'as pilote George Frederick (Buzz) BEURLING meurt dans l'écrasement d'un avion qu'il achemine en Palestine pendant la guerre d'indépendance d'Israël (1948). La même année, Sherman Wilson, dit « Snark », ancien chef pilote de la British West Indian Airways, est abattu pendant une révolution au Salvador. En Israël, Clifford Denzel (Denny) Wilson, de Hamilton (Ontario), ancien combattant de l'Aviation royale du Canada (ARC) pendant la DEUXIÈME GUERRE MONDIALE, descend deux Spitfire égyptiens. Joseph John Doyle et John McElroy, de London, abattent respectivement trois et quatre avions arabes, et le lieutenant d'aviation Leonard Fitchett est tué pendant une attaque de bombardiers contre une forteresse égyptienne. Plusieurs centaines d'autres Canadiens servent en tant que volontaires dans les forces israéliennes, notamment Ben Dunkelman, Lee Sinclair, Morris Pearce et John (Jack) Blanc, de Toronto. Ce dernier est abattu en 1964 en tentant d'empêcher un vol de banque. Tony Foster (né en 1932), pilote de l'ARC, écrivain et vétéran de la guerre de Corée, participe au renversement d'Arbenz, au Guatemala (1954), et de Villeda Morales, au Honduras (1957). Des Canadiens participent à des conflits au Congo, au Biafra, en Rhodésie, en Angola et dans d'autres pays d'Afrique et d'Amérique latine dans les années 60 et 70, et pas moins de 35 000 servent dans les forces américaines aux côtés de volontaires de Grande-Bretagne, d'Irlande, d'Allemagne et de Corée pendant la GUERRE DU VIÊT-NAM. Richard Dextraze, fils du général retraité de l'Armée canadienne Jacques DEXTRAZE, est au nombre des 56 Canadiens déclarés tués ou disparus au combat pendant cette guerre. L'aventurier et journaliste à la pige torontois Peter Bertie est tué au combat au Nicaragua en mars 1987 aux côtés des « Contras », l'armée de guérilla anticommuniste.