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Pratiques funéraires au Canada

Les pratiques funéraires consistent en l’observance d’une série de coutumes relatives à la personne décédée et en les arrangements à prendre pour la disposition de son corps. Elles impliquent un ensemble d’exigences sociales et légales qui requièrent habituellement les services de plusieurs professionnels.

Préarrangements funéraires

Beaucoup d’arrangements peuvent se prendre avant le décès, depuis la rédaction du testament jusqu’aux dons de certains organes. La loi et les coutumes canadiennes restreignent cependant le mode d’exécution des dernières volontés après le décès. Grâce à l’appui des sociétés de prévoyance funéraire et de la fraternité des médecins se fait jour une tendance croissante à léguer des organes aux fins de transplantation et de recherche médicale, mais la famille de la personne défunte peut s’y opposer. Ce type de décision dépend beaucoup des attitudes et traditions religieuses. Une personne peut dicter la nature et le type de ses obsèques, le traitement final de son cadavre et même le contenu des avis mortuaires qui paraîtront dans les journaux.

Au Canada, les préarrangements funéraires sont chose beaucoup plus courante qu’au dernier siècle. Dans la plupart des grandes villes, on trouve des sociétés de prévoyance funéraire, organismes bénévoles sans but lucratif, qui informent les consommateurs et qui influencent l’attitude du public quant aux coûts des services funéraires. Leur objectif est d’encourager les préarrangements et de veiller à ce que les entreprises funéraires offrent des options de funérailles simples et peu coûteuses.

Dans les cas de personnalités, de membres des forces armées ou de la police, les protocoles de funérailles officielles peuvent avoir préséance sur les coutumes et les volontés du défunt ou de sa famille. Dans tous les arrangements, autant les valeurs du groupe concerné que les organisations professionnelles jouent un rôle significatif. Les funérailles nationales rendent hommage aux fonctionnaires, y compris aux gouverneurs généraux, aux premiers ministres et aux députés. Ces commémorations publiques sont organisées de façon officielle et donnent aux citoyens l’occasion de pleurer et de célébrer des personnalités nationales.

Les funérailles de Sir John A. Macdonald au cimetière Cataraqui.
Crédit: Bibliothèque et Archives Canada
Procession funéraire lors des funérailles de John McCrae à Wimereux
Photo en noir et blanc (tirage brillant). À l'arrière-plan, plusieurs rangées de personnes portant le deuil (infirmières militaires, officiers et soldats). Au premier plan, cinq officiers tournant le dos à l'objectif. Deux officiers en tête de la procession tiennent des fleurs et tirent le chariot sur lequel est posé le cercueil de John McCrae. Le cercueil est recouvert de l'Union Jack et de fleurs. Le général Morrison (à gauche) et le général Aime (à droite) sont au premier rang des personnes en deuil et se tiennent entre Bonfire (le cheval) et le cercueil. Arthur Currie se tient au garde-à-vous dans la rangée des officiers. On l'aperçoit juste derrière les naseaux de Bonfire.

Procédures préalables à l’inhumation

Une personne peut être déclarée morte en l’absence de signes vitaux ou d’activité cérébrale. En cas de mort subite ou d’absence d’une cause précise de décès, le coroner provincial ou le médecin légiste réclame une autopsie. Puisque les soins de santé sont de juridiction provinciale, ce sont les lois provinciales qui stipulent les exigences légales. Dans tous les cas, celles-ci ont préséance sur les opinions religieuses.

Des codes non écrits président aussi à l’annonce d’un décès. La famille immédiate passe avant les membres de la parenté qui pourraient se trouver plus près du lieu du décès, et ce serait un manquement à l’étiquette de ne pas informer du décès un proche parent. Comme rien ne peut être entrepris avant que le médecin signe le certificat de décès, le protocole hospitalier exige cette première étape. Dans le cas des juifs orthodoxes, un certain délai peut précéder l’annonce d’un décès (particulièrement à la veille du sabbat) et les arrangements relatifs à la sépulture doivent attendre la fin du sabbat (voir Judaïsme).

Les décès causés par une maladie infectieuse sont traités autrement. En cas de décès par suite d’une maladie très contagieuse, comme le charbon (aussi appelée fièvre charbonneuse) ou la rage, le cadavre doit être placé immédiatement dans un contenant ou un cercueil en acier sans être embaumé. Si un corps doit être expédié hors frontières, le bureau local de la santé doit certifier qu’il n’est pas porteur d’une maladie contagieuse.

Maison funéraire

Au Canada, les salons funéraires constituent une industrie de services. Dans les régions éloignées, la plupart des funérailles se déroulent dans les salons funéraires. La présence d’un directeur des funérailles est généralement facultative sauf dans certaines provinces qui l’exigent. Auparavant, les employés des salons funéraires étaient tous des hommes, mais les directrices des funérailles sont de plus en plus fréquentes dans l’industrie.

Les embaumeurs doivent posséder un permis provincial et, même si la loi canadienne ne l’exige pas, l’embaumement est entré dans les mœurs. Certaines lois provinciales exigent l’embaumement ou le placement dans un cercueil scellé pour les corps qui ne sont pas acheminés au cimetière dans les 72 heures suivant le décès. Les exigences de formation des embaumeurs varient selon les régions du Canada, avec un minimum de un à deux ans de cours professionnels; dans certains endroits, un cours par correspondance et un apprentissage sur place suffisent.

La crémation d'un journalier hindou près de Victoria, en Colombie-Britannique, le 15 juin 1907.
Temple sikh Akali Singh
Vue hivernale du temple sikh Akali Singh

Certains groupes religieux, tels que les hindous (voir Hindouisme), les sikhs (voir Sikhisme) et les musulmans (voir Islam), exigent que la préparation du corps revienne au fils aîné ou à une personne désignée à cet effet. Pour la majorité des Canadiens, cependant, c’est le directeur des funérailles qui prépare le corps, le lave, vide les artères et les veines de leur sang qu’il remplace par un fluide embaumeur (compensant ainsi la décoloration de la peau), nettoie et désinfecte les cavités thoracique et abdominale, applique des cosmétiques, coiffe les cheveux et revêt le corps des vêtements fournis par le plus proche parent. En cas de traumatismes, il peut aussi restituer l’apparence du visage. La plupart des musulmans font exception à cette règle puisqu’ils ont l’habitude d’envelopper le mort dans un linceul tout de suite après l’avoir lavé avant de le porter en terre le jour même, lorsque c’est possible. Selon les coutumes islamiques, l’enterrement doit avoir lieu le plus rapidement possible après le décès.

Plusieurs options s’offrent au directeur des funérailles en matière de coûts et de services. Certains fournissent le cercueil et les services essentiels à prix fixe. Ce système est populaire en cas de préarrangements funéraires et demande à la famille endeuillée moins de temps et de prises de décisions. Une autre option est celle du système de prix fonctionnel, qui ajoute au prix de base celui du cercueil et des services choisis.

Les nombreuses critiques à l’égard des coûts pratiqués par l’industrie des funérailles ont engendré quelques changements, comme la mise en place d’organisations et d’entreprises « sans superflu ». Toutefois, les familles peuvent toujours choisir des cercueils haut de gamme et des services coûteux. Les coûts d’un enterrement peuvent varier selon les régions et entre zones urbaines et rurales.

La visitation ou la vigile

Ce qu’on appelait autrefois la « veillée funèbre » est maintenant la visitation ou la vigile. Elle a lieu en présence du défunt avant l’enterrement. Autrefois, elle avait lieu au domicile de la famille. Bien que cette coutume subsiste encore, surtout chez les nouveaux immigrants venus d’Europe, les vigiles cèdent maintenant la place à des visites au salon funéraire, où la famille du défunt reçoit les condoléances des visiteurs. Les membres des Premières Nations choisissent parfois un cercueil orné de dessins autochtones, en particulier si la cérémonie comprend un cercueil ouvert. Pendant longtemps, les proches parents et les amis intimes avaient coutume d’acheter des bouquets de fleurs, dont la dimension varie selon le degré de proximité de leurs liens avec la personne décédée. Ces dernières années, les familles sont de plus en plus portées à demander des dons pour des œuvres de charité à la place des fleurs.

Funérailles d'un enfant inuit, Port Burwell, Quebec [Nunavik], 13 mai 1928.

Les services funéraires varient en fonction des pratiques religieuses et culturelles. En l’absence d’une mosquée, les musulmans peuvent réciter une dernière prière sur le corps du défunt au domicile de celui-ci avant de le conduire au cimetière. Étant donné qu’ils n’ont pas l’habitude d’embaumer le corps, cette dernière prière se récite le jour même du décès. Elle est suivie sans délai de l’inhumation par des hommes membres de la communauté. Chez les catholiques romains, les anglicans et les chrétiens de rite orthodoxe oriental (voir Église orthodoxe), ainsi que pour tous ceux qui ont appartenu à une église pendant leur vie, la norme veut que le service religieux soit célébré à l’église en présence du corps. Certaines de ces confessions voient dans l’église le seul lieu sanctifié où célébrer une messe, mais beaucoup d’autres communautés considèrent que l’église est l’endroit approprié pour des funérailles, quelle que soit l’appartenance religieuse. En contexte urbain, la chapelle funéraire joue un rôle beaucoup plus grand. Une tendance récente se dessine sous la forme d’un service commémoratif qui rend hommage aux réalisations de la personne décédée au cours d’une cérémonie souvent embellie par un choix de poèmes et de musiques rappelant quelques-uns des goûts de cette personne. De tels services peuvent n’avoir aucune connotation religieuse. Depuis une vingtaine d’années, il y a de moins en moins de services funéraires (en raison des incinérations, des enterrements repoussés ou des célébrations privées), bien qu’il soit impossible de quantifier ce changement.

Funérailles chinoises \u00e0 Victoria, Colombie-Britannique, 13 décembre, 1890.

Le cortège funèbre est dirigé par les voitures où prennent place les proches parents en deuil que suivent le corbillard et les voitures des amis de la famille. Les phares du cortège d’automobiles avertissent traditionnellement les passants de bien vouloir s’arrêter par respect pour le défunt. Cette coutume est cependant en voie de disparition. Traditionnellement, les Sino-Canadiens tiennent à un cortège funèbre impressionnant pour refléter le statut de la personne dans la communauté.

Inhumation

Selon la norme, l’inhumation se fait en terre dans des cimetières conformes aux exigences ethniques et religieuses. L’incinération (qui consiste à réduire le corps en cendre en le brûlant) est de plus en plus courante. Les premiers bouddhistes du Canada suivent l’exemple de Bouddha en incinérant leurs morts. Actuellement, certains bouddhistes ne suivent plus cette pratique et enterrent leurs morts ou conservent leurs cendres dans des tombes. Certains chrétiens orthodoxes, musulmans traditionnels, juifs et chefs spirituels autochtones refusent l’incinération pour des motifs religieux. L’incinération est de plus en plus fréquente même chez les catholiques romains, et le pape lève tout interdit à son encontre en 1963. Les sunnites, quant à eux, attachent de l’importance à l’orientation du corps enterré, qui doit faire face à La Mecque. Selon les directeurs funéraires, le mode de disposition des corps est affaire de culture et non de religion. Quoi qu’il en soit, le manque d’espace pour enterrer les corps encourage aussi l’incinération.

L’écologisation de l’industrie, une autre tendance récente, concerne tous les aspects des services funéraires, de la teinture utilisée sur le bois des cercueils à la réduction des coûts du gaz nécessaire pour l’incinération. Dans le processus d’embaumement, on encourage l’utilisation d’un nouveau type d’agent de conservation pour remplacer le formaldéhyde à cause de sa longévité et de ses répercussions sur les nappes phréatique et le sol des cimetières. Certains salons funéraires n’offrent que des services écologiques.

Les cimetières peuvent être privés ou publics, bien que la loi restreigne l’usage des premiers. La loi considère le lieu de sépulture comme un bien immobilier attesté par un acte de vente. Cet « acte » prend souvent la forme d’une location plutôt que d’un plein transfert de titre. La plupart des cimetières ont des règlements concernant les pierres tombales, les monuments funéraires et même les fleurs. Les cimetières modernes essaient souvent de créer un aménagement ressemblant à celui des parcs, plutôt que des rangées traditionnelles de tombes. Au Canada, les cimetières ethniques, religieux et confessionnels sont chose courante et n’accueillent que leurs membres.

Les cimetières peuvent limiter le temps d’usage des lots ou réutiliser un lot pour une personne apparentée après un laps de temps précis. La mode des monuments funéraires ostentatoires se perd progressivement, parfois à la demande des cimetières, mais aussi à cause du prix élevé des matériaux comme le marbre. Au pays, on trouve certains parcs commémoratifs renfermant des aires réservées à des thèmes spéciaux ou des jardins ethniques, et le coût de leurs lots comporte un certain pourcentage consacré à leur entretien à perpétuité.

Cercueil

Le service au pied de la fosse avec la mise en terre accompagnée d’un jet symbolique de terre sur le cercueil est le dernier geste que posent les personnes en deuil. La fermeture de la fosse est faite par les ouvriers du cimetière. La disposition des cendres provenant de l’incinération revient à la famille du défunt, et comme aucune loi ne fixe de lieu précis pour leur entreposage, les cendres peuvent être dispersées n’importe où. Certaines personnes les placent dans une urne, et certains cimetières ont, à cet effet, des niches dans un caveau.

Rites postfunéraires

Il n’y a pas de durée fixée pour la période de deuil. La loi judaïque traditionnelle fixe celle-ci à une semaine, après quoi elle enjoint les survivants à réintégrer la communauté. Certaines traditions, comme chez les chrétiens coptes, exigent des veuves qu’elles portent des vêtements noirs pendant une année, qui se termine par un service commémoratif. Certains catholiques ont coutume de faire dire une messe au premier anniversaire du décès et d’autres en commandent plusieurs. Les protestants, par contre, évitent cette commémoration de la personne décédée. Certains musulmans tiennent un souper commémoratif tous les ans, en particulier si la personne était bien connue dans la communauté.

Les mormons célèbrent souvent des rituels spéciaux destinés à élever jusqu’à l’état de grâce l’esprit des personnes décédées sans être initiées à la foi. Différents chrétiens orthodoxes consacrent une journée spéciale pendant l’année au souvenir des morts de leur communauté, dont les noms sont récités en même temps que des prières, après quoi chaque famille se rassemble près de la tombe du disparu.

Pour la plupart des Canadiens, les funérailles représentent la dernière rencontre publique avec leurs morts. Certains peuples autochtones du Yukon et du Nord de la Colombie-Britannique érigent au-dessus de la tombe une petite demeure entourée d’une clôture et qui renferme des offrandes symboliques destinées à accompagner la personne décédée dans son voyage au pays des morts. Des mausolées peuvent aussi être érigés pour les personnes riches et de haut rang, mais les coûts et la réticence à glorifier la personne disparue empêchent cette pratique de se répandre. Pour les personnes qui laissent un testament derrière elles, un liquidateur testamentaire en réunit les bénéficiaires pour leur en faire la lecture de sorte que la mémoire de cette personne survit dans les biens qu’elle lègue. Les visites privées aux tombes peuvent servir à raviver le souvenir des défunts mais, sauf pour ceux qui suivent les traditions ancestrales, il y a peu de liens visibles avec les morts.