Chien laineux des peuples salish | l'Encyclopédie Canadienne

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Chien laineux des peuples salish

Le chien laineux des peuples salish a joué un rôle important dans la vie des Salish de la côte sur l’île de Vancouver, au détroit de Georgia et dans l’État de Washington. Son poil est alors notamment utilisé pour tisser des vêtements et des couvertures. En raison de la présence grandissante des colons européens et de leur laine de mouton filée à la machine, la population de chiens laineux des peuples salish est en décroissance dans les années 1800, puis s’éteint vers 1900.
Deux jeunes filles des Premières Nations tenant un chien laineux des peuples salish
Portrait de deux jeunes filles des Premières Nations tenant un chien laineux des peuples salish. Photo prise à Chilliwack par James O. Booen, premier photographe professionnel de la Colombie-Britannique (vers 1895-1897).
(avec la permission du Chilliwack Museum and Archives, Booen Fonds, P. Coll 120 No. 25.)

Description

Le chien laineux des peuples salish est un chien de petite taille à poil long, généralement blanc, doté d’oreilles pointues, d’une queue enroulée, d’une face ressemblant à celle d’un renard et d’une fourrure épaisse.

Lorsque le capitaine George Vancouver aperçoit le chien laineux des peuples salish près du Puget Sound en 1792, il le compare à un modèle agrandi d’un poméranien. Selon les officiers de marine espagnols Cayetano Valdés y Flores et Dionisio Alacalá Galiano, la bête, vue lors de leur visite de la côte du Nord-Ouest en 1792, n’aboie pas, mais « ne fait qu’hurler misérablement ».

De nos jours, plusieurs chercheurs considèrent que le chien laineux des peuples salish se rapproche, en matière de races de chien contemporaines, du spitz japonais et de l’esquimau américain.

Évolution

Il y a un peu plus de 14 000 ans, les chiens domestiques ont évolué à partir de deux populations de loups distinctes : une en Asie et une en Europe. Il y a entre 14 000 et 6 400 ans, les humains ont commencé à amener les chiens domestiques asiatiques vers l’ouest et à effectuer des croisements avec les races européennes.

Le chien laineux des peuples salish se rapproche davantage des premières races asiatiques que des chiens domestiques d’Europe. John Keast Lord, naturaliste du 19e siècle, avance que la race résulterait d’un naufrage japonais sur la côte du Pacifique, sans toutefois pouvoir étayer cette théorie. Les chercheurs savent cependant que le chien laineux des peuples salish s’est développé avant le premier contact avec les Européens; les plus vieilles dépouilles de la race sont trouvées au Puget Sound et dans le détroit de Georgia et remontent à 4 000 ans.

Répartition et habitat

Le chien laineux des peuples salish a vécu sur les territoires des Salish de la côte, y compris au sud de l’île de Vancouver, dans le détroit de Juan de Fuca, au Puget Sound, à la presqu’île Olympic, dans le détroit de Georgia et dans le bas Fraser. L’animal vit généralement en meutes de 20 à 30 individus. On le nourrit de poisson et de suif de wapiti (gras fondu) pour que son pelage soit résistant et puisse être utilisé comme laine. Pour conserver la race, les peuples salish de la côte isolent les chiens des autres races domestiques. Le chien laineux des peuples salish est alors souvent confiné à de petites îles autour des îles de Vancouver et de San Juan. Les bêtes vivant sur des îles isolées sont souvent laissées à elles-mêmes au printemps et à l’été. Leurs maîtres reviennent ensuite à l’automne pour les tondre. Pour les peuples du Puget Sound parlant le twana, le chien laineux des peuples salish partage des habitations en planches avec ses maîtres tandis que les chiens de chasse vivent à l’extérieur. Comme les autres races de chiens domestiques, le chien laineux des peuples salish se serait probablement reproduit tous les six mois.

Vêtements et couvertures des Salish de la côte

Il semblerait que le chien laineux ait été élevé pour son pelage, que les Salish de la côte mélangeaient avec du poil de chèvre des montagnes pour tisser des vêtements et des couvertures. Lorsque les poils des chiens sont suffisamment longs, les tisserandes les lavent avec une argile blanche pour en retirer les saletés. Elles utilisent ensuite des pierres tranchantes ou des couteaux faits avec des coquillages de moules pour tondre les chiens comme des moutons, en coupant le poil près de sa peau. Le poil recueilli est alors entreposé avec de l’argile séchée pour en extraire les huiles et tuer les parasites. On estime que les chiens permettaient la production de jusqu’à trois manteaux par année.

Même si la tradition orale autochtone et l’histoire écrite par les colons racontent toutes deux l’utilisation de poils de chien pour faire des couvertures, très peu d’exemples de ces couvertures ont été trouvés. Certains pensent que le poil de chien, étant très commun, était probablement surtout utilisé pour créer des couvertures sans grande importance. Ainsi, ces couvertures auraient été utilisées fréquemment et se seraient détériorées rapidement. Il semblerait également que le poil de chien aurait été principalement utilisé pour le tissage avant 1862, moment auquel la laine de mouton s’est répandue sur les territoires des Salish de la côte. Quelques exemplaires de couvertures contenant des poils de chien mélangés avec d’autres fibres (par exemple celles de chèvre de montagne) se sont conservés. Cependant, selon les connaissances des chercheurs, une seule couverture faite principalement avec des poils de chien a été conservée. Elle se trouve au Burke Museum of Natural History and Culture de Seattle, dans l’État de Washington.

Relations avec les humains

Les chiens laineux des peuples salish étaient probablement adoptés par des familles de haut rang dans les communautés salish de la côte. Chez les peuples autochtones de la presqu’île Olympic, ce sont les femmes qui sont les maîtresses des chiens et ceux-ci sont transmis de mère en fille.

Les chiens laineux ont une grande valeur dans les peuples salish de la côte, puisque les couvertures faites avec leur fourrure sont considérées comme une source de richesse de base lors des potlatchs. Les chiens laineux des peuples salish sont souvent enterrés enroulés dans une couverture pour leur rendre hommage.

Extinction

Au 19e siècle, la population de chiens laineux des peuples salish est en déclin. La présence accrue de colons européens et de leurs chiens mène à la reproduction croisée des chiens laineux, ce qui décime leur population. De plus, les populations autochtones elles-mêmes sont réduites en raison des déplacements et des maladies causées par la colonisation. Finalement, dans les années 1820, les postes de traite de fourrure offrent des couvertures anglaises filées à la machine et peu coûteuses. Ces couvertures européennes indiquent qu’il n’est alors plus nécessaire de garder les chiens pour leur poil, surtout en raison du fait que nourrir les meutes requiert du saumon qui pourrait autrement être consommé par les humains. En 1900, les caractéristiques du poil des chiens laineux des peuples salish ont disparu, bien que quelques rares chiens auraient été repérés sur des réserves jusqu’en 1940.

Il existe actuellement peu de preuves matérielles de la présence du chien laineux des peuples salish. L’artiste Paul Kane a peint « A Woman Weaving a Blanket » (une femme tissant une couverture) entre 1849 et 1856, qui montre une tisserande songhees ou saanich et un chien laineux blanc bien visible. Le tableau, ainsi que d’autres ébauches du chien réalisées par l’artiste, peut être vu au Musée royal de l’Ontario. En 1859, le naturaliste C.B.R. Kennerly recueille la peau du « célèbre chien indien Mutton » de l’ethnologue américain George Gibbs pour le National Museum of Natural History de la Smithsonian Institution. Cette peau est considérée comme le seul spécimen restant de chien laineux des peuples salish.