Royal Winnipeg Ballet | l'Encyclopédie Canadienne

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Royal Winnipeg Ballet

En 1941, le club prend le nom de Winnipeg Ballet et devient semi-professionnel. Il se produit régulièrement à Winnipeg et effectue des tournées au Canada à l'occasion. En 1949, il obtient un énorme succès au deuxième Canadian Ballet Festival à Toronto.
Peregrine, David
Premier danseur du Royal Winnipeg Ballet dans les années 1970 et 1980, David Peregrine interpr\u00e8te de fa\u00e7on convaincante et avec élégance, un large éventail de r\u00f4les, allant des classiques aux ballets modernes (avec la permission du Royal Winnipeg Ballet).

Royal Winnipeg Ballet

  Le Royal Winnipeg Ballet (RWB) est la deuxième compagnie de ballet parmi les plus anciennes en Amérique du Nord et la plus ancienne compagnie de danse toujours active au Canada. À l'origine, le RWB est un club de ballet mis sur pied en 1938 par deux professeures de danse anglaises, Gweneth LLOYD et Betty FARRALLY, qui ont immigré au Canada à l'invitation d'amis. En juin 1939, le club se produit pour la première fois en public en participant au spectacle historique organisé en l'honneur de la visite du roi George VI et de la reine Élisabeth dans la ville. Deux courts ballets sur des thèmes propres à la prairie, Grain et Kilowatt Magic, dont Lloyd a fait la chorégraphie, sont présentés, mais le couple royal n'y assiste pas.

En 1941, le club prend le nom de Winnipeg Ballet et devient semi-professionnel. Il se produit régulièrement à Winnipeg et effectue des tournées au Canada à l'occasion. En 1949, il obtient un énorme succès au deuxième Canadian Ballet Festival à Toronto. Avec Lloyd comme chorégraphe principal, Farrally comme maîtresse de ballet et David Yeddeau comme régisseur et directeur de production, la compagnie se crée un profil durable de troupe solide offrant des programmes composés de ballets courts, agréables et accessibles. La compagnie profite aussi de l'implication de plusieurs membres et étudiants des facultés de l'Université du Manitoba qui conçoivent et réalisent les décors et les costumes. Malgré cette forte participation de la communauté, la compagnie éprouve régulièrement des problèmes financiers et, en 1949, décide de se réorganiser comme une compagnie professionnelle gérée par un conseil d'administration. Ni Lloyd ni Farrally ne s'accommodent de cette nouvelle organisation. En 1950, Lloyd déménage à Toronto pour ouvrir une école et, même si elle revient à l'occasion pour faire de la chorégraphie, le RWB est dirigé par Farrally. En 1953, le Winnipeg Ballet est la première compagnie de tout le Commonwealth à se voir accorder une charte royale et effectue des tournées aux États-Unis avec la célèbre ballerine britannique Alicia Markova.

En juin 1954, les locaux loués par le RWB sont dévastés par un incendie qui détruit entièrement ses collections de costumes, ses partitions musicales originales, ses partitions chorégraphiques et ses décors. Après une période difficile au cours de laquelle la compagnie lance une campagne de financement afin de se reconstruire, le RWB recommence à se produire en 1955, mais traverse une période trouble où la direction est chaotique. En fait, Farrally partage la direction avec une danseuse et chorégraphe américaine, Ruthanna Boris. En 1957, R. Boris démissionne à la suite des hésitations du conseil d'administration à soutenir ses projets ambitieux. Au printemps de 1957, Farrally démissionne pour les mêmes raisons et le chorégraphe américain Benjamin Harkarvy est engagé. En mars 1958, il démissionne aussi à la suite de conflits avec le conseil d'administration et on demande à un ancien danseur principal et chorégraphe de la compagnie, Arnold SPOHR, de prendre la compagnie en mains pour sauver les représentations prévues à Winnipeg. Il conduit la troupe vers le succès et en devient rapidement le directeur, poste qu'il va occuper pendant 30 ans.

Spohr a de grandes ambitions pour le RWB et, malgré les limites imposées par un conseil d'administration souvent réfractaire à la nouveauté, il conduit la troupe vers le succès international durant les années 1960 et 1970. Son apport exceptionnel en tant que maître de ballet, sa dévotion à la danse et un sens aiguisé pour la programmation contribuent à fournir un fort accent artistique qui dote le RWB d'une vive personnalité, qualifiée notamment de « fraîcheur des prairies » par un critique. Grâce à l'insistance de son directeur, le RWB crée sa propre école en 1962, puis fonde une division de formation professionnelle distincte sous la direction de David MORONI en 1970. Spohr continue à offrir des programmes d'œuvres courtes, diversifiées au niveau du style et du thème, pratique qu'il a acquise sous la direction de Lloyd et Farrally. Il recherche aussi constamment des chorégraphes, souvent en début de carrière, qui donnent un répertoire original à la compagnie. Brian MACDONALD est le premier d'entre eux et la compagnie lui doit ses premiers succès importants aux États-Unis et en Europe à la fin des années 1960.

En 1966, le RWB présente le premier long ballet réellement canadien, Rose Latulippe, de Macdonald. La compagnie remporte aussi un solide succès avec les œuvres de Norbert VESAK. Spohr présente des œuvres de chorégraphes de réputation internationale comme Oscar Araiz, John Neumeier (qui dote la compagnie de sa première œuvre classique de longue durée avec sa version extrêmement originale de Casse-Noisette), Vicente Nebrada et les chorégraphes néerlandais Hans van Manen, Jiri Kylian et Rudi van Dantzig. Il cultive également une association avec la célèbre chorégraphe de ballet américaine de Broadway Agnes de Mille, qui crée des œuvres et en met d'autres en scène pour le RWB.

Au milieu des années 1960, Spohr agrandit le RWB en le dotant de 25 danseurs, nombre que la compagnie garde par la suite, à quelques fluctuations près. Comme le public de base est restreint dans sa ville de résidence, le RWB effectue constamment des tournées. À la fin des années 1960, il devient l'une des principales attractions dans le circuit international, renommé pour sa capacité d'adaptation aux différentes scènes et reconnu comme un ambassadeur culturel du Canada. Outre ses tournées pratiquement continuelles aux États-Unis et au Canada, le RWB donne des représentations dans nombre de villes situées outremer. Il est la première compagnie de ballet canadienne à se produire à Athènes, au Caire, à Jérusalem, à Londres, à Leningrad, à Moscou, à Paris et à Prague. Il est également la première compagnie à se produire à Cuba après la révolution castriste. Sous la direction de Spohr et de ses successeurs, il se produit dans toute l'Europe, en Amérique Centrale et du Sud ainsi qu'en Asie et en Australie.

En 1980, l'école professionnelle du RWB dote la compagnie de danseurs davantage formés aux œuvres classiques. Deux de ses diplômés de la fin des années 1970, Evelyn HART et David PEREGRINE, remportent des concours internationaux de ballet au Japon et en Bulgarie. Cette pépinière de talents, combinée à la conviction du conseil d'administration qu'il existe une demande pour des ballets longs à Winnipeg, pousse Spohr à présenter davantage d'œuvres classiques de longue durée, notamment Roméo et Juliette de van Dantzig (1981), Giselle de Peter Wright (1982) et Le Lac des cygnes de Galina Yordanova (1986). Certains observateurs accusent Spohr de s'écarter du répertoire d'œuvres diverses du RWB, jusqu'alors fort apprécié, afin de garder Hart au sein de la compagnie. Le CONSEIL DES ARTS DU CANADA s'oppose à cette évolution parce qu'elle s'écarte de la formule qui a fait ses preuves et qu'elle comporte des risques financiers. Toutefois, les spectateurs apprécient et le RWB continue à présenter des productions de longue durée ainsi que ses « programmes variés » traditionnels.

Tout au long de son histoire, le RWB dépend souvent de la générosité et du soutien des quelques présidents et membres du conseil. Depuis la fin des années 1950, Kathleen Richardson, de l'influente et prospère famille Richardson de Winnipeg, est la plus importante d'entre eux. Même si son aide financière constante sauve souvent le RWB du désastre, ses sages conseils et son soutien pratique, apportés discrètement et sans condition, sont à la base du succès de la compagnie, surtout pendant la direction de Spohr, avec qui elle cultive une relation de travail serrée. Le dévouement de Richardson au bien-être du RWB n'a pas son pareil dans l'histoire des arts de la scène au Canada.

En juin 1988, Spohr prend sa retraite. Le danseur principal Henny Jurriëns, ancien adjoint du directeur van Dantzig au Dutch National Ballet, lui succède. Jurriëns met en place un programme qui vise à moderniser la compagnie et à améliorer son image et son répertoire, mais il meurt dans un accident de voiture en avril 1989, avant d'avoir pu réaliser ses projets. Deux mois plus tard, la compagnie subit une nouvelle perte lorsque le danseur David Peregrine périt dans un accident d'avion dans les montagnes de l'Alaska, accident auquel aucun passager ne survit. En 1990, l'Australien John Meehan, ancien membre de l'American Ballet Theatre, devient le directeur artistique et enrichit le répertoire d'œuvres de chorégraphes de renommée internationale comme Antony Tudor, sir Frederick Ashton, Jiri Kylian et Jerome Robbins. Il présente La belle au bois dormant et met l'accent sur de nouvelles œuvres, puis engage le danseur Mark GODDEN comme chorégraphe résident. Meehan, qui se sent isolé à Winnipeg et frustré par les difficultés financières chroniques de la compagnie, démissionne en 1993. William Whitener, ancien membre du Joffrey Ballet et de la compagnie Twyla Tharp Dance, puis directeur artistique des BALLETS JAZZ de Montréal, lui succède. Il fait face à des problèmes financiers continuels, aux critiques concernant les choix du répertoire et les difficultés avec les danseurs, et il est renvoyé en 1995 et remplacé par l'ancien danseur principal André Lewis en 1996.

La réaction de Lewis aux problèmes financiers de la compagnie est de présenter un certain nombre d'œuvres populaires importantes, notamment Dracula de Godden, La Belle et la Bête et Butterfly de David Nixon ainsi qu'une nouvelle version de Casse-Noisette de Galina Yordanova et de Nina Menon pour remplacer la version non traditionnelle et longue de Neumeier. À la fin des années 1990, la majorité des compagnies de ballet canadiennes croulent sous les difficultés financières et ont du mal à retenir leur public. Elles se tournent alors vers un répertoire largement plus populaire, notamment des ballets théâtre de longue durée afin de garantir le succès à la billetterie. Néanmoins, les choix des œuvres effectués par Lewis sont très critiqués au sein du RWB et à l'extérieur. Son poste est mis en danger en 2001, mais Lewis demeure en place, et devient le directeur artistique à être resté le plus longtemps en poste depuis Spohr.

Les premières années d'existence du RWB sont racontées de façon réaliste dans un documentaire historique lancé en 2008 intitulé 40 Years of One Night Stands: The Story of the Royal Winnipeg Ballet. Toutefois, le RWB ne jouit plus de la réputation qu'il avait sous la direction de Spohr pendant les années du « ballet boom » international. Au cours des dernières années, comme bon nombre de troupes de danse du pays, le RWB doit se consacrer à développer son public local. La position traditionnelle de la compagnie sur le marché de l'Ouest canadien est concurrencée par l'essor du BALLET BRITISH COLUMBIA de Vancouver et de l'ALBERTA BALLET de Calgary.

En réaction à ces difficultés, Lewis lance une programmation composée de longs ballets accessibles au grand public, dont Peter Pan (chorégraphie de Morris, 2006), Wonderland (chorégraphie de Hounsell, 2011) et Moulin Rouge, The Ballet (chorégraphie de Morris, 2009). Il reste attaché à la mise en valeur de nouveaux talents canadiens, dont Shawn Hounsell, Jorden Morris et Peter Quanz. Notamment, le RWB présente des spectacles en compagnie des danseurs du BALLET NATIONAL à l'occasion du gala des Olympiades culturelles de Vancouver en 2010. Même s'il fait moins de tournées, il va en Israël en 2010 pour fêter le 70e anniversaire de la compagnie. Les choix habiles de Lewis et sa foi dans les talents de Winnipeg s'avèrent payants dans les dernières années.

Quoi qu'il en soit, les cycles de succès et d'infortune font partie intégrante de l'histoire de cette compagnie âgée de plusieurs dizaines d'années, et il ne subsiste aucun doute sur sa capacité d'adaptation et de survie.

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