BGL (Jasmin Bilodeau, Sébastien Giguère, Nicolas Laverdière) | l'Encyclopédie Canadienne

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BGL (Jasmin Bilodeau, Sébastien Giguère, Nicolas Laverdière)

​Les artistes Jasmin Bilodeau, Sébastien Giguère et Nicolas Laverdière forment le collectif BGL, fondé en 1996.

Les artistes Jasmin Bilodeau, Sébastien Giguère et Nicolas Laverdière forment le collectif BGL, fondé en 1996. Le trio est aujourd’hui actif sur la scène artistique québécoise, canadienne et internationale. Par leurs œuvres in situ, souvent composées d’objets préfabriqués et recyclés, les trois créateurs remettent en question avec ironie le culte voué à l’art, à sa contemplation et à son lieu d’exposition, tout en critiquant la société de consommation actuelle. BGL a été sélectionné pour représenter le Canada à la 56e Exposition internationale d’art de la Biennale de Venise en 2015.

Fondation et débuts du collectif

Dès leur sortie de l'Université Laval, à Québec, les trois jeunes créateurs Jasmin Bilodeau (Lac-Mégantic, 1973), Sébastien Giguère (Arthabaska, 1972) et Nicolas Laverdière (Québec, 1972) commencent à réaliser des œuvres in situ critiques et humoristiques s’attaquant aux problèmes de la consommation et de la culture populaire et urbaine. Dans leurs premières œuvres exposées à travers le Québec, les trois artistes préconisent l’utilisation du bois; cellulaires, voiture sport, cabine téléphonique et autres objets de luxe et de consommation de masse sont réalisés à partir de bois sculpté. Dans Chapelle mobile (1998), BGL expose la structure en bois d’une petite chapelle à l’intérieur de l’Église St. Matthew, à Québec. Matériaux, produits de consommation et lieux voient leur fonction première remise en question par le biais de ces installations ironiques et objets inutilisables.

Au tournant des années 2000, le trio commence à faire appel à des matériaux recyclés, notamment afin de s’attaquer à des questions de surconsommation. Dans l’installation Abondance difficile à regarder, présentée au Musée national des beaux-arts de Québec en 2000, le message est explicite : des centaines de bouteilles en plastique de produits ménagers sont assemblées afin de créer un plafond multicolore et translucide, donnant un effet de vitrail d’église. Ironiquement, le lieu de culte artistique devient un lieu où réfléchir et condamner le culte de la consommation, mis en parallèle avec le culte religieux. En 2002, l’œuvre Le manège, une installation requérant la participation active des spectateurs, est constituée d’un carrousel à balançoires propulsé grâce à des sacs de poubelle remplis de déchets servant de contrepoids. La structure festive surplombe un sol jonché de rebuts et de débris domestiques. Le visiteur est déchiré entre plaisir enfantin et dégoût face aux conséquences de la surconsommation.

Quoique plusieurs des installations de BGL soient des œuvres in situ rattachées à la symbolique des lieux d’exposition, certains de ses projets revêtent un caractère performatif et interactif, généralement teinté d’humour et d’absurdité. Dans Bosquets d’espionnage, présenté dans les rues de Toulouse en 2004, les créateurs se cachent avec peu de subtilité derrière de faux bosquets construits à partir de planches de bois peintes et observent les passants avec des jumelles, parfois même en étant entourés d’une équipe de tournage tout à fait à découvert. Dans le cadre de l’événement Manif d’art 3 tenu à Québec en 2005, les trois artistes, vêtus de combinaisons de sport et de patins à roues alignées, parcourent les rues de la capitale en poussant une moto montée sur roulettes. Rapides et dangereux (2005) est une performance qui illustre bien l’humour loufoque du trio.

Dans le cadre de l’exposition Commercial Pleasure, le groupe ébranle avec espièglerie les spectateurs par rapport à leur rôle; alors qu’une des salles d’exposition de la galerie Diaz Contemporary, à Toronto, est simplement remplie de meubles de bureau, les visiteurs cherchent les « vraies » œuvres présentées. Dans une autre salle, une des œuvres photographiques accrochées au mur tombe régulièrement sur le sol grâce à un petit mécanisme, surprenant les spectateurs mal à l’aise. BGL propose ainsi une autocritique en s’attaquant à la définition de l’œuvre d’art, à la fonction de la galerie ainsi qu’au rôle et aux perceptions des membres du public.

Projets d’art public

En 2011, le trio est sélectionné par le ministère de la Culture du Québec dans le cadre du concours pour l’intégration d’une œuvre d’art à l’architecture de la future Maison symphonique de Montréal. Intitulée C’est sûrement des Québécois qui ont fait ça, l’installation suspendue, constituée de trois spirales géantes, évoque des ondes sonores flottant dans différentes directions. En 2014, BGL expose Water Velocity/La vélocité de l’eau, une sculpture cinétique gigantesque représentant un corridor de piscine tordu tel une piste de montagne russe, devant le complexe aquatique des Jeux panaméricains de juillet 2015 à Toronto.

Projets récents

Il n’est pas rare que le trio réintroduise des morceaux de ses installations antérieures dans de nouvelles expositions, proposant ainsi une critique face à son propre discours. Dans le cadre de l’exposition bgl : Sculpteurs Bonimenteurs présentée en 2013 au Musée d’art contemporain des Laurentides, à Saint-Jérôme, les trois artistes se penchent sur le thème de la banlieue, sur l’uniformisation et l’individualisme sous-tendus par cette réalité sociale. Pour ce faire, ils réintroduisent la voiture de bois présentée dans l’installation Perdus dans la nature à la fin des années 1990. Ainsi décontextualisé et projeté dans un lieu autre, ce morceau raconte une nouvelle histoire et permet un dialogue inédit, selon les créateurs se décrivant comme des tricheurs et des conteurs.

Après avoir participé à la Biennale de La Havane en 2006 et aux biennales d’Ushuaia et de Montréal l’année suivante, BGL a été sélectionné en 2014 pour représenter le Canada à la 56e Exposition internationale d’art de la Biennale de Venise 2015. En partenariat avec la commissaire invitée Marie Fraser, le trio y propose un pavillon canadien transformé en dépanneur, placardé de publicités de bières canadiennes et d’affiches de Loto-Québec. Dans une seconde salle s’empilent des centaines de contenants métalliques couverts de coulisses multicolores de peinture et contenant des pinceaux de toutes tailles; ces boîtes de conserve de sauce tomate Heinz et de maïs Géant Vert, produits alimentaires économiques, détonnent avec ironie dans ce contexte artistique de grande renommée. Encore une fois, le modus operandi du trio repose sur une déstabilisation du spectateur grâce à des illusions et des travestissements ironiques.

Le collectif québécois est aujourd’hui représenté par la galerie Parisian Laundry à Montréal et par Galerie 3 à Québec. On retrouve de ses œuvres dans de nombreux musées canadiens, dont le Musée d’art contemporain de Montréal et le Musée des beaux-arts du Canada, à Ottawa.