Idle No More | l'Encyclopédie Canadienne

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Idle No More

Ancré dans la communauté autochtone, le mouvement Idle No More est né en novembre 2012 en protestation contre l’introduction de la loi C-45 du gouvernement conservateur de Stephen Harper. Officiellement connue sous le nom de Loi sur l’emploi et la croissance, cette loi omnibus a touché plus de 60 lois, dont la Loi sur les Indiens, la Loi sur la protection des eaux navigables et la Loi sur les évaluations environnementales. Les militants de Idle No More ont fait valoir que les changements apportés par la loi réduisaient les droits et l’autorité des communautés autochtones tout en permettant aux gouvernements et aux entreprises de faire avancer plus facilement des projets sans évaluation environnementale rigoureuse. Le mouvement a rapidement reçu un soutien important au Canada et à l’international, et s’est étendu aux questions de la protection de l’environnement et aux droits des Autochtones en général.
Environ 1000 manifestants du mouvement Idle No More \u00e0 Windsor, en Ontario, le 16 janvier 2013.
Image:The Canadian Press/Geoff Robins.

Fondation du mouvement Idle No More

Idle No More est créé en novembre 2012 en Saskatchewan par quatre femmes : Jessica Gordon, Sylvia McAdam, Sheelah McLean et Nina Wilson. En effet, un échange de courriels entre les quatre femmes à propos du projet de loi C-45 mène à la création d’une page Facebook, qu’elles intitulent « Idle No More ». Le nom devient instantanément populaire, et le mouvement s’étend rapidement pour englober les questions de la sauvegarde de l’environnement et du respect de l’autonomie gouvernementale des Autochtones.

Idle No More : causes importantes et activisme

Au cœur du mouvement Idle No More se trouve l’opposition à la loi C-45, qui est introduite par le gouvernement conservateur de Stephen Harper en octobre 2012. La Loi de 2012 sur l’emploi et la croissance est un document de plus de 400 pages affectant quelque 60 actes de loi, dont la Loi sur les Indiens, la Loi de la protection des eaux navigables (maintenant la Loi sur la protection des eaux navigables) et la Loi canadienne sur lévaluation environnementale. Les activistes d’Idle No More arguent que les modifications à la loi facilitent la mise sur pied par le gouvernement et les grandes entreprises de projets n’ayant pas fait l’objet d’une évaluation environnementale stricte (comme dans le cas des pipelines), en plus de diminuer considérablement les droits et l’autorité des Premières Nations.

Les quatre fondatrices du mouvement amorcent leur effort de protestation sur Facebook, où elles partagent leurs inquiétudes quant à la loi C-45. Il ne faut pas attendre longtemps pour que le mouvement prenne de l’ampleur et descende dans les rues et les centres commerciaux. En plus de séances d’information et de rassemblements, un certain nombre d’événements de foule éclair sont organisés, lors desquels la foule exécute des danses en rond dans les centres commerciaux partout au pays, en particulier durant la saison achalandée des fêtes. Le 17 décembre 2012, par exemple, une foule éclair se réunit et danse au Cornwall Centre, à Regina. Le jour suivant, une danse similaire a lieu au West Edmonton Mall. En janvier 2013, six jeunes et un guide quittent la communauté crie de Whapmagoostui, près de la baie James, au Québec, pour entreprendre le voyage de Nishiyuu, une expédition de quelque 1 600 km jusqu’à Ottawa en soutien à Idle No More. À son arrivée, le 25 mars 2013, le groupe compte près de 400 marcheurs et est accueilli par des milliers de partisans sur la Colline du Parlement. Les activistes d’Idle No More mettent également sur pied des journées d’action nationales. D’autres vont jusqu’à organiser des blocus (bien qu’au moins une des cofondatrices s’est dite inquiète que de tels actes d’agression ne nuisent au message et à la nature pacifique du mouvement).

Idle No More et la chef Theresa Spence

On associe également le mouvement Idle No More à la chef Theresa Spence, de la communauté crie d’Attawapiskat, qui s’impose un jeûne liquide du 11 décembre 2012 au 24 janvier 2013 pour dénoncer l’échec du gouvernement fédéral à honorer ses obligations et les droits des Autochtones en vertu des traités qu’il a ratifiés. Malgré des intérêts communs, Theresa Spence n’est pas porte-parole pour Idle No More, un fait soulevé par la cofondatrice Sylvia McAdam lors d’une entrevue en janvier 2013.

Impact du mouvement Idle No More

Le mouvement Idle No More attire des sympathisants dans les communautés autochtones et non autochtones du Canada et du monde entier grâce à des danses et à des rassemblements au pays, mais aussi aux États-Unis et outre-mer. Selon le site Web du mouvement, plus de 50 événements ont lieu lors de la Journée d’action mondiale d’Idle No More, le 28 janvier 2013, dont 25 au Canada, 20 aux États-Unis et plusieurs rassemblements à Londres (Royaume-Uni), à Paris (France) et au Groenland. Les médias concentrent beaucoup de leurs efforts sur la loi C-45 et sur les droits des Autochtones en général, permettant un éveil de conscience auprès du public, ce qui, selon certains commentateurs, a mené, le 11 janvier 2013, à une rencontre entre le premier ministre Stephen Harper, le chef national Shawn Atleo et d’autres membres de l’Assemblée des Premières Nations.

Luttes continues

Même si la couverture médiatique du mouvement a diminué après la rencontre de janvier 2013 entre le premier ministre et les délégués de l’Assemblée des Premières Nations, Idle No More continue de préconiser le changement. En mars 2013, Idle No More forme une alliance avec Defenders of the Land, un réseau de militants impliqués dans les questions de droits territoriaux autochtones depuis 2008. Dans le cadre de cette alliance, Idle No More accepte de soutenir les actions directes non violentes, comme des barrages. Les deux organisations publient également une déclaration commune qui demande aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de prendre les mesures suivantes : 1) abroger les dispositions de la Loi de 2012 sur l’emploi et la croissance (le projet de loi C-45) qui portent atteinte aux droits ancestraux et issus de traités et à la protection de l’environnement; 2) améliorer et « approfondir » la démocratie en mettant en œuvre la représentation proportionnelle (voir Réforme électorale) et en assurant la consultation des Autochtones dans le cas des lois concernant les droits collectifs et la protection environnementale; 3) mettre pleinement en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, y compris leur droit de refuser les projets de développement sur leur territoire; 4) mettre fin à la politique gouvernementale d’« extinction » du titre autochtone, en reconnaissant plutôt le titre et les droits ancestraux conformément à l’article 35 de la Constitution et en vertu des recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones; 5) respecter les traités historiques; et 6) tenir une enquête nationale sur les femmes autochtones disparues et assassinées.

Depuis 2013, Idle No More organise et soutient des rassemblements et d’autres manifestations en faveur des droits des autochtones et de la protection de l’environnement. En février 2018, par exemple, le mouvement réclame une journée d’action pour soutenir la famille de Colten Boushie, un homme de 22 ans de la Nation crie de Red Pheasant, en Saskatchewan, qui a été abattu par un agriculteur en août 2016. Après que l’agriculteur, Gerald Stanley, est acquitté de tous les chefs d’accusation qui pèsent sur lui le 9 février 2018, Idle No More se joint aux nombreuses voix appelant à des changements dans le système judiciaire. Ces appels s’intensifient après l’acquittement de Peter Khill qui, en février 2016, a abattu Jon Styres, un homme des Six Nations d’Oshweken qui tentait de voler le camion de Khill. Lorsque Peter Khill est reconnu non coupable de meurtre au deuxième degré en juin 2018, les communautés autochtones à travers le pays se joignent aux Six Nations pour demander des changements. Idle No More appuie l’appel à l’action « Justice pour Jon Styres », affirmant que « les parallèles entre les affaires Jon Styres et Colten Boushie ne peuvent être ignorés, car les deux affaires montrent comment les [jurys] canadiens à travers le pays continuent d’envoyer le message aux communautés autochtones que la propriété privée [des Canadiens] vaut plus que les vies des peuples autochtones ».

Idle No More continue de soutenir les manifestations pour la protection de l’environnement et les droits des Autochtones. Au début de 2019, notamment, le mouvement demande aux peuples autochtones et aux « Canadiens de conscience » d’appuyer les Gitdumt’en et les Unist’ot’en dans leur opposition au projet de gazoduc Coastal GasLink (CGL) de TransCanada.

Importance d’Idle No More

Idle No More a commencé par protester contre le projet de loi C-45, une loi omnibus présentée par le gouvernement conservateur de Stephen Harper en 2012. Depuis, le mouvement s’est développé pour englober des questions plus larges concernant les droits et la souveraineté des Autochtones ainsi que la protection de l’environnement. Le mouvement a contribué à galvaniser la communauté autochtone et à stimuler la discussion sur ces questions au sein de la communauté en général.