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Immobilier, industrie de l'

Les promoteurs immobiliers construisent et possèdent des immeubles urbains de tous genres : tours d'habitation, immeubles industriels et centres commerciaux.

Immobilier, industrie de l'

Les promoteurs immobiliers construisent et possèdent des immeubles urbains de tous genres : tours d'habitation, immeubles industriels et centres commerciaux. Bien que la plupart d'entre eux se considèrent comme des individualistes opposés à la réglementation gouvernementale, l'industrie des aménagements de terrain est en fait un produit de la politique d'aménagement industriel d'après-guerre. Ottawa avait entrepris de favoriser la création de grandes entreprises de construction qui procureraient de l'emploi et érigeraient en même temps les habitations et autres installations requises. Ainsi, est née la SOCIÉTÉ CANADIENNE D'HYPOTHÈQUES ET DE LOGEMENT, une société de la Couronne qui fournit le soutien nécessaire. Ottawa contribue à ce que les capitaux nécessaires soient disponibles avec l'aide d'institutions financières et d'investisseurs, et accorde à l'industrie des allégements fiscaux, qui réduisent, voire annulent ainsi les impôts sur les profits des promoteurs.

Après la guerre, les entrepreneurs voient les possibilités qu'offre la construction d'habitations dans les banlieues de chaque ville. Certains se rendent compte que les aménagements de terrain sont encore plus rentables que la construction elle-même. Dans les années 50, d'autres entrepreneurs saisissent le potentiel de la construction de tours d'habitation. Quand arrivent les années 60 et 70, les promoteurs immobiliers érigent en plus des logements, de nombreux centres commerciaux à grande et petite surface.

La ville d'après-guerre construite par les promoteurs ne ressemble en rien à celle qui l'a précédée. Cinq types d'aménagement sont particulièrement fréquents : les tours d'habitation dans le centre-ville et dans les banlieues; les nouvelles banlieues mettant en vedette un nouveau style de maison érigée sur un grand terrain dans des rues circulaires plutôt qu'à angle droit (le prototype est Don Mills, une ville construite près de Toronto dans les années 50 par l'industriel et promoteur E.P. TAYLOR); les parcs industriels de banlieue dont les immeubles à un étage sont construits sur de grands terrains desservis par route plutôt que par rail; les complexes commerciaux et d'affaires du centre-ville, combinant une quantité énorme de bureaux et des magasins (le premier immeuble de la sorte est la PLACE VILLE-MARIE à Montréal, construite entre 1956 et 1965 par le promoteur américain William Zeckendorf); et les centres commerciaux, où le promoteur-propriétaire fournit, sous un même toit, tous les services commerciaux nécessaires à une collectivité, louant les locaux principalement à des chaînes de détaillants (le prototype est le Park Royal Vancouver, érigé par la famille Guinness, propriétaire de la brasserie du même nom).

Les promoteurs immobiliers se trouvent souvent au coeur de controverses. Au milieu des années 70, on accuse leur industrie d'avoir causé la hausse rapide du prix des logements. On pointe du doigt les terrains, étant donné que les terrains à construire viabilisés se vendent à des prix qui excèdent de beaucoup les coûts engagés par les promoteurs. Certains analystes laissent entendre que la poignée de grandes entreprises fournissant la majorité de ces terrains exploitent leur pouvoir sur le marché. D'autres affirment que les prix et les profits élevés résultent d'une réglementation artificielle de l'offre de terrains imposée par les planificateurs et les municipalités (voir ZONAGE). En 1980, le marché atteint son plus haut niveau depuis la guerre quand, à Vancouver, une maison de banlieue ordinaire comprenant trois chambres à coucher se vend à un prix plus de deux fois plus élevé que celui de la même maison en banlieue de Montréal où, chose inhabituelle, les terrains à construire sont aménagés par des centaines de petits promoteurs.

Pendant la période d'expansion urbaine rapide que connaît le Canada, les entreprises d'aménagement de terrain sont en plein essor. Plus d'une dizaine de compagnies affichant un actif de 100 millions de dollars ou plus font leur apparition, en partie à la suite d'une expansion interne, en partie à la suite de prises de contrôle. Certaines appartiennent à des entrepreneurs, d'autres à des investisseurs canadiens et étrangers. Un des chefs de file de cette industrie est la Corporation Cadillac-Fairview Limitée, fruit de la fusion d'une entreprise torontoise et d'une société montréalaise appartenant à une filiale de la famille Bronfman. Un autre chef de file est Olympia & York Developments Ltd., une compagnie privée appartenant à la FAMILLE REICHMANN de Toronto.

À la fin des années 70, le ralentissement de l'industrie pousse de nombreux promoteurs canadiens à percer le marché américain. Toutefois, la dure récession et les taux d'intérêt élevés de 1980 ne font qu'empirer leurs difficultés. Certaines firmes ont peine à payer l'intérêt des sommes empruntées pour financer cette expansion américaine et sont obligées de liquider des actifs de grande valeur. Ces mêmes taux d'intérêt entraînent aussi l'effondrement de la demande d'habitations au Canada. Au début des années 80, beaucoup de promoteurs éminents éprouvent de graves problèmes, et certaines entreprises importantes sont mises sous séquestre et vendent des actifs importants. Ce sont les sociétés de l'Ouest canadien, particulièrement de l'Alberta, qui sont aux prises avec les plus grandes difficultés, l'effondrement des prix (et de la valeur des biens-fonds en général) y étant plus considérable qu'ailleurs au pays. Les survivants de cette débâcle ne sont souvent pas les entrepreneurs, mais bien les grandes firmes comme Olympia & York et Cadillac-Fairview, qui ont concentré leurs efforts sur la construction et le maintien d'immeubles à bureaux, de centres commerciaux et d'autres immeubles de location dans les centres-villes.

L'industrie des aménagements de terrain offre un exemple remarquable des résultats possibles d'un mariage réunissant entrepreneurs, possibilités de profit et capitaux importants. Les institutions financières canadiennes et autres prêteurs ont injecté 14 milliards de dollars en financement immobilier dans les années 60, 90 milliards dans les années 70 et 140 milliards dans les années 80. Les promoteurs ont réalisé des profits très considérables et payé peu sinon pas d'impôt sur ces profits. Ils ont fourni les habitations dont avaient tant besoin les villes canadiennes, bien que les formes types de construction qu'ils ont utilisées aient été remises en question sur les plans social, économique et écologique. Les fonds canadiens investis dans la propriété, qui auraient très bien pu servir à d'autres causes plus productives, ont alimenté l'explosion des prix des biens immobiliers et le surinvestissement par les promoteurs. Le tout a fini par entraîner l'effondrement de plusieurs des grandes firmes immobilières et de graves problèmes pour les institutions financières, surtout celles de l'Ouest, qui ont consenti des hypothèques en fonction de prix artificiellement élevés.

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