Jacques Hébert | l'Encyclopédie Canadienne

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Jacques Hébert

Jacques Hébert, journaliste, auteur de voyage, éditeur et sénateur (né le 21 juin 1923 à Montréal, au Québec; décédé le 6 décembre 2007 à Montréal, au Québec). Jacques Hébert était un journaliste québécois en croisade et un éditeur de livres pionnier avant et pendant la Révolution tranquille. Il a fondé Jeunesse Canada Monde, programme d’échange dédié à la paix dans le monde, et a cofondé Katimavik, programme jeunesse offrant des postes de bénévoles à travers le pays. En tant que membre du Sénat, Jacques Hébert a tenu un jeûne de 21 jours pour protester contre l’annulation du financement de Katimavik par le gouvernement. Ses voyages l’ont mené dans plus de 130 pays; il a notamment visité la République populaire de Chine en 1960 avec son ami de longue date Pierre Trudeau. Jacques Hébert a également été un critique réputé du premier ministre du Québec Maurice Duplessis et un fédéraliste qui méprisait le nationalisme québécois. Il a été fait officier de l’Ordre du Canada en 1978.

Jeunesse

Jacques Hébert est l’un des six enfants nés de l’union de Denise (née St-Onge) et du Dr Louis-Philippe Hébert. Le Dr Hébert était membre du corps consulaire de Montréal ; il a servi au Guatemala pendant près de 30 ans et a été admis à l’Ordre du Quetzal en 1961.

Jacques Hébert a fréquenté le collège Sainte-Marie, un pensionnat jésuite. Après avoir été expulsé de l’École des hautes études commerciales de Montréal (maintenant appelée HEC Montréal), il a étudié à l’Université Saint Dunstan (maintenant l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard) à Charlottetown, à l’Î.-P.-É. C’est là qu’il apprend l’anglais, tout comme l’avait fait son père avant lui.

Auteur de voyage

Jeune homme, Jacques Hébert finance ses voyages en travaillant comme correspondant itinérant pour Le Devoir, périodique montréalais de langue française. En 1950, il saute dans un jeep surnommé « Alouette » et entame un périple d’un an avec son ami, le Dr Jean Phaneuf. Il décrit ses aventures dans plusieurs livres de voyage en français. Son premier ouvrage relate un voyage de 14 mois le long de la route pan-américaine, qui traverse l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud jusqu’en Patagonie.

Le livre de voyage le plus connu de Jacques Hébert est coécrit par Pierre Trudeau et retrace leur aventure de 1960 en République populaire de Chine, dans le cadre de laquelle ils ont rencontré Mao Tse-tung. L’ouvrage est publié en 1961, soit 7 ans avant que Pierre Trudeau devienne chef du Parti libéral et premier ministre. Au cours de sa vie, Jacques Hébert visite plus de 130 pays.

Journaliste et éditeur

Jacques Hébert se taille une réputation de journaliste à la plume acérée pour sa couverture du procès de Wilbert Coffin, un prospecteur de Gaspé inculpé en 1953 et pendu 3 ans plus tard pour le meurtre d’un touriste américain, après que 3 corps sont retrouvés dans les bois. Wilbert Coffin ne témoigne pas à son procès et aucun témoin n’est appelé à sa défense. L’affaire devient une cause célèbre, parce que le gouvernement du Québec est accusé d’avoir incité la police et la Couronne à clore rapidement le dossier pour protéger l’industrie du tourisme.

Jacques Hébert publie 3 livres dénonçant le verdict tout en dépeignant Coffin comme un bouc émissaire : Coffin était innocent (1958), J’accuse les assassins de Coffin (1963) et L’affaire Coffin (1980). En 1964, le gouvernement du Québec nomme une commission royale pour enquêter sur l’affaire, qui conclut que Coffin a eu un procès juste. Peu avant, le sous-procureur général avait qualifié le livre de Jacques Hébert de « pitoyable et grossier ». Jacques Hébert passe d’ailleurs 3 jours en prison pour une accusation d’outrage au tribunal qui est plus tard renversée.

En 1954, Jacques Hébert lance Vrai, un brûlot hebdomadaire qui expose la corruption à l’hôtel de ville de Montréal, ainsi que les méfaits du gouvernement québécois de l’Union nationale, dirigé par le premier ministre Maurice Duplessis. En 1958, il rejoint l’équipe éditoriale de Cité libre, un magazine rédigé par des intellectuels québécois s’opposant à Duplessis.

Jacques Hébert fonde 2 maisons d’édition : les Éditions de l’Homme en 1958 et les Éditions du Jour en 1961. (Voir aussi Petites maisons d’édition de langue française ; Édition de langue française.) Ces maisons d’édition se spécialisent dans l’impression de livres de poche abordables et destinés au marché de masse. En plus d’y publier ses propres écrits sur l’affaire Coffin, Jacques Hébert publie des ouvrages comme l’essai politique Pourquoi je suis séparatiste, du québécois Marcel Chaput, et la biographie critique de Duplessis, signée Pierre Laporte. Il publie également Les insolences du frère Untel, une critique éloquente et incisive du système d’éducation du Québec. L’ouvrage, écrit sous un nom de plume par le frère mariste Jean-Paul Desbiens, fait sensation. Il se vend à plus de 100 000 exemplaires et mène à des réformes majeures en éducation dans la province. Il est par ailleurs considéré comme un ouvrage phare de la Révolution tranquille. Parmi les autres auteurs publiés par Jacques Hébert, on compte Roch Carrier, Marie-Claire Blais et Michel Tremblay.

Autres projets

De 1962 à 1970, Jacques Hébert est également animateur et scénariste pour des émissions d’affaires publiques diffusées sur les ondes de Radio-Canada. De 1971 à 1981, il est commissaire de la Commission de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

Comité Applebaum-Hébert

En 1979, Jacques Hébert est nommé co-président, avec le compositeur torontois Louis Applebaum, du Comité de révision de la politique culturelle fédérale, composé de 18 membres. Après 3 ans d’audiences publiques partout au Canada, le Comité Applebaum-Hébert publie un rapport de 380 pages. Le rapport affirme que les institutions culturelles canadiennes sont en péril et offre 101 recommandations pour régler la situation, dont des congés d’impôts pour les artistes et un remaniement de la CBC et de l’Office national du film.

Sénat

En 1983, le premier ministre Pierre Trudeau nomme Jacques Hébert au Sénat. Il siège en tant que représentant libéral de la division Wellington, qui inclut les Cantons de l’Est, au Québec. Il quitte son poste 15 ans plus tard, le jour de son 75e anniversaire, après avoir servi comme chef de l’opposition officielle et comme whip en chef du gouvernement.

Jeunesse Canada Monde et Katimavik

Inspiré par ses propres expériences de voyageur, Jacques Hébert fonde Jeunesse Canada Monde en 1971. L’organisation offre aux jeunes la chance de participer à des programmes éducatifs internationaux. La première cohorte est envoyée au Cameroun, en Malaisie, au Mexique, en Tunisie et en Yougoslavie pour travailler sur des projets de développement.

En 1977, Jacques Hébert fonde Katimavik, un programme de services pour les jeunes conçus pour promouvoir l’engagement citoyen. Chaque année, environ 1100 participants passent 9 mois au sein d’un petit groupe d’autres jeunes à acquérir des compétences en leadership et une deuxième langue tout en s’attaquant à des projets communautaires dans tout le Canada.

En 1986, le financement fédéral du programme est retiré par le gouvernement progressiste-conservateur de Brian Mulroney. Jacques Hébert, alors un sénateur de 62 ans, tient une grève de la faim et dort dans un sac de couchage sur le plancher de marbre de la salle du Sénat en signe de protestation. Il ne consomme que de l’eau minérale pendant trois semaines, au cours desquelles il reçoit la visite d’amis et d’alliés. Il met fin à son jeûne lorsqu’un comité privé sans but lucratif organisé par Jean Chrétien accepte d’essayer de poursuivre le programme.

Vie personnelle

Jacques Hébert a épousé Thérèse Desjardins, originaire de Beloeil au Québec, en 1951. Cinq enfants sont nés de leur union.

Prix

Jacques Hébert est nommé officier de l’Ordre du Canada en 1978 pour son rôle de président fondateur de Jeunesse Canada Monde et son implication dans d’autres mouvements sociaux et culturels. En 1995, il reçoit le prix Lewis Perinbam du développement international pour avoir fondé Jeunesse Canada Monde ; le programme inspire d’ailleurs des programmes équivalents en Suède et aux Pays-Bas. En 2007, l’Association canadienne des ex-parlementaires remet à Jacques Hébert le prix du service émérite pour avoir favorisé la compréhension des traditions parlementaires du Canada.

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