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Réserves au Canada

Une réserve est une terre qui a été réservée par le gouvernement du Canada à l’usage d’une Première Nation. Les réserves sont régies par la Loi sur les Indiens. Les réserves ne représentent qu’une petite partie des territoires traditionnels que les Premières Nations possédaient avant la colonisation européenne. Elles sont habitées par les membres d’une Première Nation; certaines d’entre elles sont utilisées pour la chasse et d’autres activités. De nombreuses Premières Nations possèdent plus d’une parcelle de terre de réserve, et certaines réserves sont partagées par plus d’une Première Nation. On trouve des réserves dans chacune des provinces du Canada, mais peu d’entre elles ont été créées dans les territoires. La plupart des réserves sont rurales, bien que certaines Premières Nations aient créé des réserves urbaines, qui sont situées dans une ville ou à proximité.

Ce texte est l’article complet sur les Réserves au Canada. Si vous souhaitez en lire un résumé en langage simple, veuillez consulter : Réserves au Canada (résumé en langage simple).

Première Nation de Garden River

Réserves au Canada

Pour des renseignements plus spécifiques sur l’histoire et l’emplacement des réserves des provinces et territoires, et pour connaître la société et la culture des peuples autochtones qui vivent dans ces réserves, veuillez consulter les articles suivants :


Qu’est-ce qu’une réserve?

Les réserves sont des terres qui ont été réservées à l’usage des Premières Nations par le gouvernement du Canada. Les Premières Nations sont l’un des trois groupes de peuples autochtones au Canada, les deux autres étant les Métis et les Inuits. Les Métis et les Inuits ne possèdent pas de réserves. Les raisons de cet état de fait sont complexes, mais une des principales tient au fait que le système des réserves est régi par la Loi sur les Indiens, et que la relation des Métis et des Inuits avec le gouvernement fédéral n’est pas régie par cette loi.

Les réserves sont constituées de petites ou grandes parcelles de terre, et la plupart sont situées dans des régions rurales ou éloignées. Certaines réserves sont utilisées pour la chasse et la cueillette, tandis que d’autres abritent des maisons et des écoles. Une Première Nation peut détenir et utiliser plus d’une réserve. Par exemple, la Nation crie de Little Red River, en Alberta, utilise deux réserves, Fox Lake 162 et John D’Or Prairie 215. (Voir aussi Cris.) Dans certaines circonstances, plusieurs Premières Nations peuvent partager une réserve. Par exemple, la réserve d’Assabaska, en Ontario, est utilisée par la Première Nation de Big Grassy et la Première Nation ojibwée d’Onigaming. Certaines Premières Nations, comme la Première Nation micmaque Qalipu, à Terre-Neuve-et-Labrador, ne possèdent aucune réserve.

Qui vit dans les Réserves?

Selon le rapport fédéral Population indienne inscrite selon le sexe et la résidence, 2020, on retrouve 3 394 réserves au Canada, qui ont été créées pour plus de 600 Premières Nations. Les membres inscrits (c’est-à-dire ayant le statut d’Indien) ont le droit de vivre dans la réserve. En 2020, à peu près 50 % de ces membres des bandes vivaient dans les réserves. Les personnes sans statut peuvent aussi vivre dans la réserve si le conseil de bande a adopté une réglementation en ce sens.

Réserve de Hay River

Gouvernance des réserves

Les réserves ne doivent pas être confondues avec les territoires traditionnels, qui sont des terres qui étaient occupées et utilisées par les peuples autochtones avant l’arrivée des Européens. Les réserves, qui ont été créées par les gouvernements coloniaux, sont des produits de la colonisation au Canada. Bien que les réserves soient considérées comme le foyer de nombreux membres de Premières Nations et qu’elles abritent les bureaux du Conseil de bande et de gouvernance, elles ne sont pas la « propriété » des Premières Nations. L’autorité suprême sur les activités dans les réserves est accordée par le ministre fédéral responsable des Affaires autochtones dans le gouvernement du Canada. (Voir aussi Ministères fédéraux des Affaires autochtones et du Nord.)

En vertu de la Loi sur les Indiens, les conseils de bande ont une autorité limitée en matière d’administration et de conservation de la réserve. Cependant, beaucoup de Premières Nations ont obtenu plus de contrôle sur les terres de leur réserve grâce à la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations (1999). Cette Loi donne aux Premières Nations le droit de se retirer de certaines dispositions de la Loi sur les Indiens relatives à la gestion des terres. Elle leur donne le pouvoir de développer leurs propres lois sur la gestion des terres dans les réserves. D’autres Premières Nations du Canada s’efforcent d’obtenir des ententes d’autonomie gouvernementale grâce auxquelles elles ne sont plus régies par la Loi sur les Indiens et obtiennent pleine autorité sur leur gouvernance, leurs règles d’appartenance et leurs territoires.

Origine des réserves

Avant la Confédération

Dès 1637, des missionnaires catholiques en Nouvelle-France réservent des terres de leurs seigneuries à l’usage des Premières Nations locales. Les missionnaires espèrent que l’installation des Autochtones sur ces terres facilitera leur conversion au catholicisme. Les autorités coloniales conservent la propriété de ces terres et leurs titres juridiques. Le concept de titre foncier étant inexistant dans la représentation du monde des peuples autochtones, ils ne considéreront jamais ces terres comme la propriété des missionnaires. La pratique coloniale de réserver des terres à l’usage des peuples autochtones tout en conservant les titres de propriété juridiques constituera le fondement du système de réserves au Canada.

Alors que la population non autochtone devient plus nombreuse, des tensions se développent avec les peuples autochtones au sujet de l’utilisation et l’occupation des territoires traditionnels. S’inspirant des pratiques utilisées par les Hollandais selon le traité du wampum à deux rangs signé en 1613, les gouvernements coloniaux anglais utilisent les traités comme une méthode pour acquérir des terres autochtones. Ces politiques sont étendues au Canada après la conquête de la Nouvelle-France. La Proclamation royale de 1763 reconnaît que les Autochtones ont des titres sur le territoire. Ces titres doivent être acquis par la Couronne à la suite de négociations, avant la colonisation et la clôture des terres. (Voir aussi Titre autochtone.)

Avant la Confédération, dans beaucoup de cas les peuples autochtones sont exclus des terres cédées par traités et forcés d’abandonner leurs villages pour aller s’établir sur des terres qui n’ont pas encore été cédées. (Voir aussi Les cessions de terres du Haut-Canada.) Alors que les gouvernements coloniaux acquièrent de plus en plus de terres autochtones, il devient habituel d’inclure dans les traités des dispositions pour réserver une partie des terres cédées à l’usage des Premières Nations qui les ont signés. Les titres des terres réservées selon les termes de ces premiers traités ne sont pas entièrement clairs, ce qui permet à des administrations municipales, des squatters et des spéculateurs de se les approprier au détriment des membres de la bande, en utilisant des pratiques trompeuses. C’est pourquoi le gouvernement colonial du Canada déclare, par une série de lois, que les titres de ces réserves demeurent à la Couronne et sont de ce fait protégés contre l’impôt et l’aliénation. Dans l’article 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867, le gouvernement fédéral se voit confier la responsabilité des « Indiens et des terres qui leur sont réservées ». Les dispositions de ces premières lois sont incorporées dans la Loi sur les Indiens.

Mission, réserve des Pieds-Noirs

Après la Confédération

La création de réserves par la méthode des traités se poursuit avec les traités numérotés négociés après la Confédération. En vertu de ces traités, les Premières Nations conservent le droit d’utiliser l’ensemble du territoire cédé pour la chasse, la pêche et la trappe. Elles reçoivent aussi des réserves où leurs membres pourront vivre de façon sécuritaire, recevoir une éducation et pratiquer l’agriculture. Les traités prévoient que les Premières Nations pourront choisir le site de leurs réserves, mais il arrive que le gouvernement rejette occasionnellement ce choix et leur assigne des terres ailleurs. La taille de la réserve promise à la Première Nation varie selon les traités.

La désignation des réserves est à l’origine de nombreux conflits. Par exemple, en Ontario, les terres de la réserve occupée par les Mohawks de la baie de Quinte (Tyendinaga Mohawk Territory) et les Six Nations de la rivière Grand ont été obtenues à l’origine dans le cadre des concessions de terres destinées aux loyalistes après la Révolution américaine. Pour cette raison, les Haudenosaunee contestent la légitimité des lois canadiennes imposant la définition d’une réserve sur leurs terres en vertu de la Loi sur les Indiens. En Colombie-Britannique et dans le Canada atlantique, de nombreuses réserves ont été créées par des décrets des gouvernements coloniaux plutôt que par des négociations avec les peuples autochtones. Ces réserves sont souvent petites et ont été transférées au gouvernement fédéral après la Confédération pour l’usage et le bénéfice de Premières Nations. En Colombie-Britannique, des réserves supplémentaires ont été arpentées selon la formule coloniale, entraînant des contestations toujours en cours dans la province. La Commission royale McKenna-McBride Royal a tenté sans succès de résoudre les problèmes liés à ces réserves, et elles demeurent un objet de négociation concernant les titres autochtones dans cette province.

Plan d’arpentage du Traité no 2

Réductions de réserves et revendications territoriales

Avant la Confédération, les gouvernements coloniaux ont souvent tenté de réduire la taille des terres réservées aux Premières Nations. Par exemple, les autorités coloniales du Haut-Canada ont déplacé beaucoup d’Anishinaabés de leurs réserves vers l’île Manitoulin en négociant des traités supplémentaires. Les nouvelles réserves sur l’île Manitoulin ont par la suite vu leur taille réduite à leur tour. (Voir aussi Cessions de terres du Haut-Canada; Territoire non cédé de Wiikwemkoong.) En Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick et en Colombie-Britannique, les gouvernements ont réduit la taille de réserves simplement par décision gouvernementale, sans négociation.

Après la Confédération, la Loi sur les Indiens a établi des règles encadrant la réduction de la taille des réserves. Selon ces règles, une majorité des membres d’une Première Nation (une majorité de membres de sexe masculin dans la version originale de la Loi sur les Indiens) peut céder les intérêts d’une partie ou de l’ensemble de la réserve à la Couronne. Le Canada doit alors gérer les terres au bénéfice de la Première Nation qui les a cédées. Utilisant ces dispositions de la Loi sur les Indiens, le gouvernement du Canada a obtenu la cession de réserves de Premières Nations partout au pays. En conséquence, la taille des réserves de plusieurs Premières Nations a considérablement diminué et beaucoup de Premières Nations se sont vues forcées de déplacer leurs réserves dans des régions plus isolées.

En 1991, le gouvernement fédéral a mis sur pied la Commission des revendications indiennes afin de répondre à de nombreuses revendications territoriales. (Voir aussi Revendications particulières.) Beaucoup de ces revendications ont été réglées au bénéfice des Premières Nations, et les fonds ont été utilisés dans certains cas pour acheter des terres et agrandir les réserves. À l’occasion, des conflits non réglés sur la cession de terres de réserves ont entraîné des affrontements violents, comme à Ipperwash et Caledonia. (Voir aussi 1492 Land Back Lane.)

Conditions socio-économiques dans les réserves

Étant donné leur grande variété d’origine, de taille et d’emplacement, il est difficile de présenter un portrait général des conditions de vie dans les réserves. Néanmoins, les réserves sont affectées par des problèmes socio-économiques qui ont un profond impact sur leurs membres. En dépit de certaines améliorations, les conditions de vie dans les réserves demeurent bien en deçà des standards reconnus au sein de la population canadienne. D’après le recensement de 2021, 31,4 % des résidents des réserves de Premières Nations vivaient dans des ménages à faible revenu et 21,4 % habitaient dans des logements surpeuplés.

À l’origine, les réserves étaient censées permettre aux Premières Nations de pratiquer l’agriculture et de recevoir une éducation, mais beaucoup d’entre elles ont été créées dans des régions isolées. À cause de leur éloignement, des services comme l’ approvisionnement en eau potable, les égouts, l’électricité et le logement n’ont jamais pu être fournis selon les standards généralement considérés comme acquis pour la majorité des Canadiens et Canadiennes. La gestion des réserves ayant été conservée par la Couronne, les Premières Nations n’ont jamais pu utiliser leurs terres et leurs ressources pour réaliser un développement économique ou assurer le financement de services sociaux. Elles sont obligées de s’en remettre à l’aide gouvernementale pour défrayer le coût de l’éducation, du logement, des services sociaux et des infrastructures. Ce financement est souvent insuffisant.

La rareté de sources d’activités économiques et d’emplois ainsi que les problèmes de logement et de services d’alimentation en eau, d’électricité et d’internet ont conduit certains membres de Premières Nations à quitter les réserves. Le gouvernement du Canada ainsi que les Premières Nations font des efforts pour améliorer les conditions socio-économiques dans les réserves. Toutefois, cette situation demeure aujourd’hui un des défis les plus pressants pour les Canadiens et les Canadiennes et les Premières Nations.

Pour en savoir plus sur les conditions socio-économiques des peuples autochtones au Canada, voir Condition sociale des Autochtones au Canada, Conditions économiques des peuples autochtones au Canada, Santé des Autochtones au Canada et Éducation des Autochtones au Canada.

Centre des congrès de Membertou

Réserves urbaines

Plusieurs Premières Nations ont choisi de ne pas vivre dans des réserves parce qu’elles sont typiquement situées dans des régions éloignées, limitant l’accès aux services publics et les possibilités de création d’emplois. Comme la plupart de la population, plusieurs Premières Nations vivent dans les plus grandes villes du Canada. Certaines Premières Nations ont créé des réserves urbaines, qui sont des réserves à l’intérieur ou à proximité de grandes villes. En vertu de la politique fédérale sur les ajouts aux réserves, les Premières Nations peuvent acquérir des terres et les ajouter à leurs réserves. Des réserves urbaines ont été créées dans beaucoup de villes canadiennes grâce à cette politique.

Une des premières de ces réserves est Asimakaniseekan Askiy, de la Nation crie de Muskeg Lake. Cette réserve urbaine est située à Saskatoon, en Saskatchewan, sur des terres précédemment occupées par l’industrie du chemin de fer. Asimakaniseekan Askiy a été offert à la nation crie de Muskeg Lake en règlement d’une revendication particulière. Elle est le siège d’une dizaine d’entreprises autochtones. Le succès de telles initiatives a conduit à la création de plus de 120 réserves urbaines à travers le pays.

Autonomie gouvernementale

Plusieurs communautés de Premières Nations sont mécontentes du contrôle exercé par le gouvernement colonial sur leurs terres et considèrent que cela entrave leur capacité à améliorer leurs conditions sociales et économiques. Certaines initiatives ont contribué à donner aux Premières Nations un contrôle plus direct sur leurs terres. Par exemple, l’Accord-cadre sur la gestion des terres des Premières nations permet aux conseils de bande de prendre en charge les responsabilités de la gestion des terres. En outre, des accords d’autonomie gouvernementale ont permis à plusieurs Premières Nations de ne plus être régies par la Loi sur les Indiens. Le projet de loi C-92 donne des pouvoirs supplémentaires aux Premières Nations en leur permettant d’administrer les soins aux enfants et les services sociaux dans les réserves.

Les accords conclus autour de revendications territoriales globales ont donné à des Premières Nations des terres qui ne sont pas des réserves selon les termes de la Loi sur les Indiens. Ainsi, la Convention de la baie James et du Nord québécois et la Convention du Nord-Est québécois ont donné aux Cris et aux Innus les Terres réservées aux Cris et les Terres réservées aux Naskapi. En vertu de la Loi sur le règlement des revendications territoriales des premières nations du Yukon, les terres des Premières Nations sont définies comme des terres visées par un règlement et ne sont pas des réserves dans le contexte de la Loi sur les Indiens. (Voir aussi Premières nations autogouvernantes au Yukon.) De même, les terres détenues par les Premières Nations Nisga’a, Tsawwassen et Tla’amin en Colombie-Britannique en vertu de leurs accords sont des terres autochtones plutôt que des réserves.