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Sudbury

Grand Sudbury, ville de l’Ontario constituée en 2001, 164 689 habitants (recensement de 2016), 163 067 habitants (recensement de 2011). Siège judiciaire du District de Sudbury, la Ville du Grand Sudbury est située sur la rive ouest du lac Ramsey (à environ 60 km au nord de la baie Georgienne). Sa constitution, en 2001, remplace l’ancienne municipalité régionale de Sudbury (1973-2000) et la Ville de Sudbury (1930-2000). Elle doit une grande partie de son développement à l’industrie minière, et plus particulièrement à l’extraction du nickel. Plus importante agglomération du Nord-Est de l’Ontario, le Grand Sudbury concentre aujourd’hui des services commerciaux, culturels et éducatifs et est reconnu pour son impressionnant reverdissement depuis les années 1970.

Peuplement

L’occupation du Moyen-Nord de l’Ontario remonte à quelque 9 000 ans, après la fonte de la dernière nappe glaciaire du continent. Au temps de l’arrivée des Européens, la région au nord du lac Huron et celle entourant le lac Supérieur sont habitées par le peuple ojibwé depuis des centaines d’années. Les Ojibwés, l’un des plus importants peuples de langue algonquine, vivent de la chasse et de la pêche, établissant généralement des campements temporaires.

Contrairement aux régions plus tempérées et plus fertiles de ce qui est maintenant le Sud de l’Ontario, la région entourant le lac Ramsey est relativement peu peuplée. Les premiers changements démographiques d’importance s’amorcent au milieu du 17e siècle, résultat de la traite des fourrures que viennent pratiquer les Français à Sault Ste. Marie. Les bandes objiwées utilisent de plus en plus d’objets européens et la chasse aux animaux à fourrure devient alors très concurrentielle; certaines bandes sont contraintes à de grands déplacements pour chasser et ce nouvel état des choses provoque bien des conflits.

Les Ojibwés entretiennent des relations plus harmonieuses avec les Français qu’avec les Britanniques; en effet, ces derniers ne se limitent pas à la traite des fourrures, mais comptent plutôt à long terme coloniser le territoire et développer l’extraction minière. Au début du 19e siècle, l’arrivée massive d’hommes blancs à la recherche de cuivre et d’autres métaux dans la région attise les tensions. Le gouvernement ignore pourtant les plaintes que formulent par écrit les Ojibwés, qui déplorent les intrusions illégales dans leurs terres vers le milieu du siècle.

La présence de marchands, de prospecteurs et d’arpenteurs blancs augmente sensiblement au cours des années suivantes. Ce n’est malgré tout que dans les années 1880, avec l’arrivée du chemin de fer du Canadien Pacifique (CP), qu’est fondée la ville de Sudbury.

Développement

Durant l’hiver de 1883, environ 3 350 travailleurs se rendent sur le site du Sudbury moderne; en mars, les premiers bâtiments sont construits. Ce qui n’était censé être au départ qu’un simple lieu d’entreposage pour le chemin de fer du CP devient une ville d’entreprises de plus en plus peuplée. C’est le chef de chantier du chemin de fer, James Worthington, qui nomme la ville d’après le lieu de naissance de sa femme en Angleterre. On n’imaginait guère que cet avant-poste éloigné, entouré de marécages et d’affleurements rocheux, deviendrait la plus grande communauté du Nord de l’Ontario.

Le commerce du bois est l’une des premières industries locales; il n’est pratiqué qu’à petite échelle mais l’activité commerciale de la ville s’accroît considérablement en 1885, à la suite de la découverte de nombreux gisements de cuivre et d’autres métaux au sein du bassin de Sudbury. Les Ojibwés auraient jadis exploité du cuivre dans la région, et des développements plus récents tels que la découverte de minerais dans la péninsule supérieure du Michigan, ainsi que les rapports de la Commission géologique du Canada, attirent l’attention sur le secteur de l’extraction minière.

En effet, le bassin de Sudbury s’avérera l’une des structures géologiques les plus particulières de tout le Canada. Formé il y a environ 1,8 milliard d’années par l’impact d’un météorite, le bassin a une dimension de 60 km sur 30 km; on y trouve de riches gisements de cuivre, mais également de nickel et de platine.

Paysage urbain

L’essor de Sudbury est d’abord restreint par les voies ferrées et la topographie, mais aussi par la faiblesse de son assisse fiscale foncière : en effet, la Ville ne commence à percevoir des taxes auprès de l’industrie minière qu’au moment de l’instauration de l’administration régionale, en 1973. La ville s’étend graduellement le long des routes principales, séparées par des corniches rocheuses. De nouvelles zones résidentielles apparaissent dans les districts de West End, Donovan, Minnow Lake, New Sudbury et Lockerby.

Vers la fin du 19e et le début du 20e siècle, de nombreux Canadiens français ont exploité la vallée agricole au nord et à l’ouest. Encouragés par le mouvement nationaliste qui visait à rapatrier des Canadiens français, partis travailler dans les usines de la Nouvelle-Angleterre, pour qu’ils « occupent » le Nord et l’Ouest canadien, des curés missionnaires ont établi des paroisses agricoles où des villages à forte majorité canadienne-française ont émergé au tournant du 20e siècle. Si les Canadiens français s’étaient principalement investis dans la récolte forestière et l’agriculture, l’appauvrissement des sols et la nécessité grandissante d’avoir un revenu d’appoint en ont amené un bon nombre à travailler dans les mines et parfois à emménager dans des quartiers particuliers : le Moulin à fleur, le centre-ville et, à partir des années 1950, la banlieue du Nouveau-Sudbury. C’est cet étalement anarchique qui mène finalement à la création d’une administration régionale en 1973 et à la nouvelle ville unifiée en 2001.

En raison de l’exploitation forestière, des incendies de forêt et de la pollution que cause la pratique de griller le minérai sur des feux à ciel ouvert pour en extraire les minéraux désirés, la végétation est clairsemée, composée essentiellement de peupliers et de bouleaux. Sudbury acquiert alors la réputation peu enviable d’être l’un des centres urbains les moins attrayants du Canada. Toutefois, dès 1973, le paysage urbain se transforme grâce au plan de reboisement et de restauration de l’environnement, le plus vaste de ce genre au monde. Entre 1978 et 2017, plus de 3 400 hectares de terrains très abîmés ont été restaurés et 9,7 millions de feuillus et de conifères ont été plantés. En reconnaissance de ces efforts, la Ville de Sudbury reçoit plusieurs prix dès 1986, notamment le Prix d’excellence environnementale du gouvernement du Canada, l’United States Chevron Conservation Award et la Médaille du gouvernement local de l’Organisation des Nations Unies, remis à l’occasion du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro, au Brésil (1992).

Sudbury compte aussi bon nombre de lacs, soit 219 à l’intérieur des limites de la ville. Le lac Ramsey, avec sa superficie de 8,25 km2, est le plus grand lac enclavé au sein d’une ville en Amérique du Nord.

Le paysage urbain comprend certains édifices d’intérêt architectural : le Bell Mansion, les églises Saint-Jean-de-Brébeuf et Christ the King, le complexe Science Nord, le Complexe municipal, le Centre fiscal de l’Agence du revenu du Canada et l’École d’architecture McEwen.

Population

Sudbury, qui compte 2 027 personnes en 1901, voit sa population doubler à chaque recensement, soit tous les dix ans jusqu’en 1931. Une fusion et une annexion d’importance en 1960 portent le nombre d’habitants à 80 120 en 1961. À la suite d’un autre élargissement en 1973, ce nombre passe à 91 829 en 1981. Avec la création de la mégaville, qui a réuni les villes formant la municipalité régionale de Sudbury, soit Capréol, Nickel Centre, Onaping Falls, Rayside-Balfour, Sudbury, Vallée-Est et Walden, en 2001, le Grand Sudbury comprend 155 601 habitants; en 2016, ils sont 164 689.

En 1901, les Canadiens d’origine britannique et française forment respectivement environ 55 % et 35 % de la population. Bien qu’ils vivent dans des quartiers différents et ne fréquentent pas les mêmes églises, les deux groupes entretiennent des relations plutôt harmonieuses. Aujourd’hui, Sudbury demeure l’une des plus importantes concentrations de Franco-Ontariens dans la province : en 2016, 26 % des résidents se disent de langue maternelle française.

La communauté française de la ville fait également partie des groupes ethniques les plus importants: selon le recensement de 2016, les résidents de Sudbury qui citent des origines canadiennes constituent le groupe ethnique le plus important, soit 47,1 % de la population. Ils sont suivis des personnes qui déclarent des origines françaises (37,2 %) et anglophones (19,9 %). Les minorités visibles ne représentent que 1,2 % de la population de la ville, les Asiatiques du Sud, les Chinois, les Noirs et les Arabes constituant les communautés les plus importantes de ce groupe. Sudbury compte également une importante communauté autochtone, soit 17,5 % de la population.

Économie et main-d’œuvre

Sudbury est historiquement connue comme une ville minière. La première compagnie, la Canadian Copper, est fondée en 1886 et commence ses activités de fusion des métaux en 1888. En 1902, la société fusionne avec l’Orford Refining Company pour former le géant International Nickel Company of Canada (INCO limitée). En 1915, les mines de Sudbury fournissent 80 % de la production mondiale de nickel. La suprématie du bassin de Sudbury est renforcée par l’établissement de la Falconbridge Nickel Mines (aujourd’hui Sudbury Integrated Nickel Operations de Glencore) en 1928. À ce jour, le bassin de Sudbury demeure l’un des plus importants producteurs de nickel du monde. De plus, le minerai local contient du plomb, du zinc, de l’argent, de l’or, du cobalt, du platine, du sélénium et du tellure.

Il n’est donc pas surprenant que la croissance de Sudbury ait été profondément influencée par les cycles d’expansion et de ralentissement étroitement liés aux fluctuations de la demande de nickel. En fait, la Canadian Copper ne trouve que difficilement preneur pour son produit au cours de ses premières années d’existence. Toutefois, dans les années 1890, on commence à utiliser du nickel dans les manufactures de blindage et il s’établit ainsi une relation entre les minières locales et les forces militaires qui durera de nombreuses décennies.

Jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, l’industrie minière est de loin le principal employeur pour l’économie régionale. L’emploi dans le secteur minier atteint son niveau record en 1971, avec 26 000 emplois; ce nombre chute au cours des décennies suivantes en raison du perfectionnement de la technologie d’extraction et de la variation de prix des métaux. L’industrie ne compte plus que 6 000 ouvriers en 2005, puis 3 000 en 2018. INCO, la plus importante des deux compagnies, est achetée par la société brésilienne Vale en 2006. (Voir aussi Main-d’œuvre minière.)

Malgré ce déclin de l’emploi, la production minière demeure élevée grâce à la mise en place de techniques d’exploitation en continu (qui permettent l’acheminement ininterrompu du minerai du front d’abattage) et à l’utilisation de technologies novatrices. En fait, Sudbury est devenu l’un des foyers du développement de la technologie minière et, à la suite du succès remporté dans la remise en état de ses terrains, elle s’est imposée en tant que centre international des sciences environnementales liées à l’exploitation minière. La ville compte maintenant plus d’une douzaine d’instituts de recherches. Parmi ceux-ci, le Centre de recherche en développement humain, le Centre de recherche en exploration minérale, le Centre d’excellence en innovation minière, l’Unité conjointe d’écologie d’eau douce, la Chaire de recherche en géomécanique, l’Institut franco-ontarien, l’Institut nord-ontarien de recherche et de développement (INORD) et le Centre de recherche en santé dans les milieux ruraux et du nord sont affiliés à l’Université Laurentienne. Le Northern Centre for Advanced Technology (NORCAT) se trouve pour sa part au Cambrian College.

Le détecteur de neutrinos souterrain le plus profond du monde se trouve à Sudbury et est exploité par l’Observatoire de neutrinos de Sudbury. Parfaitement opérationnel depuis 1999, l’Observatoire recueille des données qui promettent des découvertes révolutionnaires liées aux propriétés des neutrinos (une sorte de particule élémentaire) et au noyau solaire. Cet observatoire place Sudbury au centre des recherches internationales dans le domaine de la physique des particules subatomiques.

La ville devient aussi un centre important d’éducation supérieure. En plus de compter les conseils scolaires catholique et public de la région, elle comprend des écoles secondaires publiques de langue anglaise, des collèges catholiques privés (Notre-Dame, Marymount, St. Charles et Sacré-Cœur) et, dès 1969, des écoles secondaires publiques de langue française. L’Université de Sudbury est fondée par les Jésuites canadiens-français en 1957. En 1960, elle devient la composante catholique de la nouvelle Université Laurentienne, une fédération bilingue et non confessionnelle de plusieurs collèges. La formation professionnelle n’est pas en manque grâce à la création du Cambrian College en 1967. En 1995, la section de langue française de Cambrian acquiert son autonomie et est choisie comme emplacement du campus principal du Collège Boréal, le deuxième collège de langue française en province. En revanche, les efforts pour obtenir une université de langue française à Sudbury n’ont pas abouti.

De nombreux emplois du gouvernement, surtout dans l’administration provinciale et dans des services tels que la Commission géologique de l’Ontario, ont également été transférés à Sudbury. On y trouve aussi, dans le secteur des services et des finances, les sièges sociaux du Nord-Est de l’Ontario de bon nombre de banques et de centres d’appel. La Loi sur les services en français (1986) a désigné Sudbury comme région offrant les services provinciaux dans les deux langues officielles.

À la suite de la construction du complexe Science Nord (1984) et de son cinéma IMAX, et grâce aux attractions qu’offre le Big Nickel (aujourd’hui associé au complexe Terre dynamique), Sudbury est aussi devenue l’une des destinations touristiques les plus populaires du Nord de l’Ontario. Pendant les mois d’hiver, le Sudbury Trail Plan entretient un circuit de 1 200 km de pistes de motoneige.

Transports

Les chemins de fer relient la ville à Sault Ste. Marie (1887) et à Toronto (1908). On entreprend en 1912 la construction d’autoroutes menant à North Bay et à Sault Ste. Marie. En 1956, on inaugure l’autoroute 69, qui descend vers le sud jusqu’à Gravenhurst. La construction de la première voie vers Timmins, par l’autoroute 144, est terminée en 1970. Quant au transport aérien, l’Aéroport de Sudbury assure des liaisons avec plusieurs villes ontariennes depuis 1954.

Communications

La ville de Sudbury est en outre un important centre de médias. Il existe dans la région plusieurs journaux, notamment le Sudbury Star, le Northern Life, Le Voyageur et le Northern Ontario Business. La radio a vu le jour en 1947 grâce aux ondes de langue française (CFBR) et de langue anglaise (CHNO). Des antennes régionales de CBC, Radio-Canada, puis d’autres radios commerciales se sont ajoutées à partir des années 1970. La télévision est apparue avec CKSO en 1953, aujourd’hui affiliée au réseau CTV.

Administration et situation politique

Hôtel de ville de Sudbury

De 1973 jusqu’à la création de la mégaville en 2001, l’administration de Sudbury comportait deux paliers : un conseil régional composé de 20 membres et d’un président, ainsi que sept conseils locaux. Cette structure politique disparaît en 2001, remplacée par une municipalité unique comprenant 12 quartiers que représentent 12 conseillers et un maire.

Vie culturelle

La transformation de Sudbury en capitale éducative fait aussi éclore une production culturelle. Dans l’effervescence culturelle que connaît la ville dans les années 1970 sont fondés le Théâtre du Nouvel-Ontario, un théâtre franco-ontarien de création, les Éditions Prise de parole, la première maison d’édition franco-ontarienne, puis La Nuit sur l’étang, le premier festival annuel de musique émergente francophone. Le Grand Sudbury compte aussi deux théâtres de répertoire de langue anglaise (Sudbury Theatre Centre, Theatre Cambrian), des galeries d’art (Galerie d’art de Sudbury et Galerie du Nouvel-Ontario), des musées (les musées du Moulin à fleur et de Copper Cliff), un orchestre symphonique, puis des activités et des festivals annuels bilingues, entre autres, le Northern Lights Festival Boréal, le Cinéfest, le Blueberry Festival, le Snowflake Festival et l’UpFest.

La ville possède bon nombre d’installations sportives et de centres de loisirs, notamment des arénas et des centres récréatifs. En 1971, la ville est aussi la première de l’Ontario à faire aménager une piscine olympique à l’Université Laurentienne; c’est là que s’est entraîné le nageur Alex Baumann, qui décroche deux médailles d’or aux Jeux olympiques de Los Angeles en 1984. Cinq parcs provinciaux se trouvent dans la région. Dans la ville même, la Zone de conservation du lac Laurentien est une destination très populaire.

Lecture supplémentaire

Liens externes