Île-du-Prince-Édouard, question des terres de l' | l'Encyclopédie Canadienne

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Île-du-Prince-Édouard, question des terres de l'

Île-du-Prince-Édouard, question des terres de l'

En 1767, le gouvernement britannique décide d'allouer, avant même le début de la colonisation, la presque totalité des terres de l'Île-du-Prince-Édouard à de grands propriétaires qui deviendraient par la suite des locateurs résidents quasi féodaux, payant des redevances à la Couronne afin de financer l'administration et la colonisation de l'île. Cependant, la plupart de ces propriétaires demeurent absents, doivent des arriérés de redevances et ne respectent pas leurs engagements de colonisation. Peu après 1770, les habitants de l'île cherchent à forcer les propriétaires soit à tenir leurs engagements, soit à céder leurs terres à ceux qui en sont en possession effective. En 1780-1781, le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard, dirigé par Walter PATTERSON, tente de forcer la vente de terres au moyen de la saisie-gagerie (saisie de biens), mais il échoue. Un cercle vicieux irréversible s'était déjà amorcé. L'élite de l'île insiste pour que les conditions de concession, bien qu'irréalistes, soient respectées ou, à défaut, que l'on procède à la confiscation des terres. Les propriétaires, en revanche, insistent sur l'impossibilité de remplir ces conditions en raison des agissements de l'élite et du gouvernement de l'île qui rendent tout investissement précaire.

Escheat (procédure par laquelle des terres non exploitées retournent à la Couronne et font l'objet d'une nouvelle allocation) devient le cri de ralliement du XIXe siècle, en dépit des multiples sens que prend le mot. Sous le lieutenant-gouverneur Edmund Fanning (1787-1804) et ses successeurs immédiats, la confiscation des terres ne suppose guère plus qu'un transfert du droit de propriété du propriétaire absentéiste au propriétaire résident. En 1830, l'admission au droit de vote des catholiques, locataires pour la plupart, favorise cependant l'avènement d'un parti populaire, l'Escheat Party, qui réclame la distribution des terres aux occupants réels. Le gouvernement britannique, éternel protecteur du droit de propriété, s'oppose à la confiscation des terres sans indemnisation. On élimine alors peu à peu les absentéistes en achetant leurs terres.

En 1860, le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard crée la commission des terres, présidée par Joseph Howe. Chargée de recommander une solution finale au problème, elle fait appel dans son rapport à un prêt impérial de 100 000 livres pour compléter le processus de rachat. Les recommandations du rapport n'ont jamais été appliquées, mais dès les années 1880, la majeure partie de l'Île-du-Prince-Édouard est entre les mains des occupants réels. Le ressentiment au sujet de la question des terres a persisté, surtout envers la Grande-Bretagne, en raison de son refus de respecter la volonté du peuple et, dans certains milieux, à l'égard des gouvernements de l'île qui ont consenti au principe de l'indemnisation.

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