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Diamond Jenness

​Diamond Jenness, anthropologue, archéologue, linguiste, spécialiste de l’Arctique (né le 10 février 1886 à Wellington, en Nouvelle‑Zélande; décédé le 29 novembre 1969 à Wakefield, au Québec).

Diamond Jenness
Diamond Jenness (\u00e0 gauche) et W.L. McKinley, magnéticien et météorologue, \u00e0 bord du Karluk, en 1913.
Diamond Jenness, anthropologue, archéologue, linguiste, spécialiste de l’Arctique (né le 10 février 1886 à Wellington, en Nouvelle‑Zélande; décédé le 29 novembre 1969 à Wakefield, au Québec).

Au cours d’une carrière qui s’étend sur cinq décennies, Diamond Jenness est devenu l’un des anthropologues les plus éminents au Canada. Il a acquis une renommée nationale et internationale pour ses descriptions minutieuses de la vie des Inuinnait (Inuits du cuivre) dans la région du golfe du Couronnement juste après les premiers contacts avec les Européens, des recherches qu’il a commencées dans le cadre de l’Expédition canadienne dans l’Arctique de 1913‑1918. Il s’est également fait connaître pour ses découvertes archéologiques des anciennes cultures Dorset et de la mer de Béring. Il a publié plus de 100 livres et articles sur les relations entre les Inuits et l’État, sur l’ethnologie, sur la linguistique, sur l’archéologie et sur l’anthropologie, notamment The People of the Twilight, l’un de ses ouvrages les plus célèbres. Pris dans son ensemble, ce corpus représente l’une des descriptions les plus exhaustives d’un groupe inuit jamais produite.

Jeunesse et début de carrière

Né le 10 février 1886 à Wellington, en Nouvelle‑Zélande, Diamond Jenness est diplômé du Victoria College en 1908 et obtient ensuite une maîtrise en anthropologie à Oxford. En 1911, il est nommé, en tant que chercheur à Oxford, en Papouasie-Nouvelle-Guinée où il conduit des recherches, pendant 12 mois, dans le nord de l’archipel d’Entrecasteaux. À son retour en Nouvelle‑Zélande, sa vie prend une tournure inattendue lorsque la division d’anthropologie de la Commission géologique du Canada l’invite à participer à l’Expédition canadienne dans l’Arctique de 1913‑1918 pour étudier les Inuinnait (Inuits du cuivre) vivant dans la région du golfe du Couronnement, une population ayant eu jusqu’alors assez peu de contacts avec les Européens.

Diamond Jenness passe la première année de l’expédition sur la côte de l’Alaska, apprenant l’iñupiaq, une langue inuit, et conduisant des fouilles archéologiques sur l’île Barter. Il se rend dans le golfe du Couronnement à l’été 1914 avec l’équipe sud de l’expédition où, au cours des deux années suivantes, il étudie la culture des Inuinnait. Il apprend une autre langue inuite, l’inuinnaqtun, acquiert une vaste collection d’objets de la culture matérielle locale, prend des centaines de photographies et enregistre des chants et des récits de la tradition orale des Inuinnait.Pendant des mois, il partage la vie de ses hôtes, au sud‑ouest de l’île Victoria, en tant que fils adoptif d’Ikpukkuaq, un chasseur respecté, et de sa femme Higilaq.Durant toute cette période, il observe et enregistre les déplacements saisonniers de sa famille adoptive, participe aux activités de chasse et de pêche dont dépend la vie des Inuits, et il apprend à maîtriser la technique difficile des déplacements en traîneau à chiens. Les nombreuses observations qu’il fait de la vie traditionnelle des Inuinnait forment la base de ses travaux ultérieurs et définissent les contours que va prendre sa carrière. À son retour de l’Arctique en 1916, il met sa carrière universitaire entre parenthèses pour s’enrôler dans l’artillerie de campagne canadienne durant la Première Guerre mondiale.

Musée national du Canada

Après la guerre, Diamond Jenness revient au Canada, épouse Frances Eileen Bleakney et accepte un poste au Musée national du Canada en 1920. Six ans plus tard, il est promu chef de la section anthropologie et cherche à approfondir les recherches et les collections du musée dans ce domaine. Il réalise lui‑même des travaux anthropologiques de terrain auprès de groupes autochtones du Nord de l’Ontario, de l’Alberta et de la Colombie‑Britannique, rédige une législation essentielle à la protection des ressources archéologiques dans les Territoires du Nord‑Ouest et est nommé président de la Society for American Archaeology en 1937 et de l’American Anthropological Association en 1939. C’est alors qu’il est plongé dans son travail de terrain et qu’il assume de nombreuses tâches administratives qu’il commence à publier une remarquable série d’ouvrages, notamment, parmi les plus célèbres, The Life of the Copper Eskimos en 1922, The People of the Twilight en 1928 et The Indians of Canada en 1932.

C’est au milieu des années 1920 que Diamond Jenness effectue ses contributions les plus importantes en archéologie. En 1924, il étudie une série d’objets trouvés à Cape Dorset et sur l’île Coats dans la baie d’Hudson. Il arrive à la conclusion que la technologie des outils utilisés constitue la marque d’une culture distincte dans l’Arctique oriental qu’il nomme culture Dorset. Bien qu’à l’époque ses conclusions soient contestées par le milieu universitaire, des enquêtes ultérieures prouveront qu’il avait raison. En 1926, il dirige, à Cape Prince‑of‑Wales et sur l’île Little Diomede dans le détroit de Béring, des fouilles qui lui permettent de définir l’ancienne culture de la mer de Béring. Ces deux découvertes modifient en profondeur la façon dont les scientifiques conçoivent la Préhistoire dans l’Arctique.

Deuxième Guerre mondiale et au‑delà

Pendant la Deuxième Guerre mondiale, Diamond Jenness est directeur adjoint du renseignement pour l’Aviation royale du Canada et chef de la Section topographique intersectorielle du ministère de la Défense nationale. Après avoir refusé d’occuper le poste de conservateur par intérim du Musée national en 1946, il met sur pied et dirige le Bureau géographique du ministère des Mines, dont la mission consiste à recueillir des données géographiques sur le Canada. En 1948, il prend sa retraite d’employé du gouvernement, tout en poursuivant ses recherches et en continuant à énormément publier, notamment une histoire économique de Chypre en 1962 et son œuvre en cinq volumes, Eskimo Administration, dans laquelle il étudie les relations entre l’État et les Inuits en Alaska, au Canada et au Groenland.

Diamond Jenness tente à plusieurs reprises d’influencer la politique du gouvernement envers les peuples autochtones du Canada, occupant même les fonctions de consultant spécial auprès de la Direction des affaires indiennes dans les années 1930, ses interventions en la matière se faisant encore plus appuyées après la guerre. Il critique le gouvernement pour le peu de possibilités de formation et d’emploi qu’il offre aux peuples autochtones partout au Canada et en particulier dans l’Arctique. Il devient un ardent promoteur de l’assimilation, c’est‑à‑dire de l’abolition du statut particulier d’Indien inscrit et de la liquidation des terres de réserve, estimant que seules ces mesures pourraient permettre aux peuples autochtones de profiter pleinement de la citoyenneté canadienne, des idées qui préfigurent celles que l’on retrouvera dans le tristement célèbre Livre blanc de 1969.

Homme d’une grande simplicité, généreux et affable, Diamond Jenness reçoit cinq diplômes honoris causa et collabore avec plusieurs sociétés savantes au Canada et à l’étranger, dont la Société géographique royale du Canada qui lui décerne la Médaille Massey en 1962. À l’automne de 1968, il est nommé Compagnon de l’Ordre du Canada, la plus haute distinction accordée au pays. La péninsule Diamond Jenness sur l’île Victoria est ainsi nommée en son honneur et, en 2004, la NASA utilise son nom pour désigner une roche sur Mars explorée par le robot mobile Opportunity.

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